Logo
Hépatite C - Règlement des recours collectifs
AccueilRechercheContactez-nousEnglishPrivacy

Demandeurs :
Renseignements essentiels
Demandeurs : Renseignements supplémentaires
Demandeurs :
Perte de revenu / Perte de soutien / Perte des services domestiques
Réévaluation périodique par les tribunaux
Renvois
Documents
Formulaires
Contacts et liens

Rapports annuels
L'administrateur


Renvois : Décisions de l'arbitre : #66 - Le 1er novembre 2002

D É C I S I O N


A. Introduction

[1] Le réclamant a présenté une demande d'indemnisation à titre de personne directement infectée dans le cadre du Régime à l'intention des transfusés infectés par le VHC (" le Régime ").

[2] Cependant, dans une lettre en date du 1er mars 2002, l'Administrateur a refusé la réclamation après avoir examiné attentivement le matériel fourni à l'appui de la réclamation avec un comité de trois (3) évaluateurs d'expérience, pour les raisons suivantes :

Les résultats de votre enquête de retraçage ont confirmé que le donneur de l'unité de sang qui vous a été transfusée au cours de la période visée par les recours collectifs s'est avéré négatif selon le test des anticorps du VHC. À la lumière de cette information, votre réclamation est rejetée. Vous avez indiqué dans votre réponse à notre première lettre que vous feriez parvenir d'autre preuve. L'information que vous avez présentée a été examinée et n'a pas favorablement influencé les résultats préalables de votre enquête de retraçage. Par conséquent, en vertu du paragraphe 3.04 du Régime à l'intention des transfusés de la Convention de règlement relative à l'hépatite C (1986-1990), vous ne répondez pas aux critères d'indemnisation et votre réclamation est rejetée.

[3] Au moyen d'une demande de renvoi à un arbitre / juge - arbitre (la " demande de renvoi ") datée du 17 mars 2002, le réclamant a demandé un renvoi de la décision du refus de sa réclamation par l'Administrateur.

[4] Au paragraphe 4 de sa demande de renvoi, le réclamant a déclaré qu'il souhaitait que la décision de l'Administrateur soit saisie pour les raisons suivantes :

Quelqu'un ment, soit (l'hôpital), soit les personnes infectées et l'hôpital dit qu'il y a eu deux (2) unités disponibles le soir en question - cela s'est déjà produit auparavant qu'on ait échangé les étiquettes, parce qu'ils ont fait une erreur.

Voici d'autres renseignements sur ce que j'ai découvert :

(1) Pour ce qui est de cet hôpital, on a trouvé récemment qu'ils s'étaient rendus coupables de ne pas dire la vérité au sujet de certaines procédures.
(2) Je n'ai jamais fait usage de drogues au moyen de seringues.
(3) J'ai vécu une vie saine, je n'ai même jamais eu d'injections de médecins qui m'ont traité…
(5) Ce n'est que 3 ou 4 années plus tard que cet hôpital m'a demandé de vérifier si quelque chose n'allait pas et mon médecin de famille à ce moment-là était le Dr R… et les résultats du laboratoire ont démontré que j'étais VHC positif que j'étais infecté par le virus de l'hépatite C…
(7) Ceci a été une lutte continuelle pour mes droits.
(8) Je vous demande de vraiment bien examiner ces formulaires et ce que vos propres investigations ont révélé. Je vous prie de porter attention à ce qui m'arrive…
(10) J'ai fait parvenir des formulaires dans le passé concernant ma déclaration sur l'endroit où je l'ai reçu et d'autres documents sont entre vos mains.

Je ne suis pas une personne exigeante mais je sais que je suis dans mon droit.

P.S. Je vous remercie pour la plus profonde sympathie à l'égard de ma demande d'examiner réellement ce qui s'est passé. J'ai l'impression qu'on m'a fermé la porte pour aucune raison de ma part. J'implore clémence, merci.

[5] Le réclamant a avisé qu'il souhaitait que la cause soit réglée par arbitrage plutôt que par renvoi et a demandé une audition en personne. L'arbitre a écrit au réclamant et au Conseiller du Fonds le 13 avril 2002, déclarant, entre autres choses, ce qui suit :

1. Dans sa demande de renvoi, (le réclamant) a coché la case indiquant qu'il souhaitait que la cause soit examinée par un arbitre plutôt que par un juge -arbitre. Je déciderai de la question dans un cas comme dans l'autre. Cependant, comme le jugement d'un arbitre est final, alors que celui d'un juge - arbitre est sujet à la confirmation par un juge de tribunal supérieur, j'invite (le réclamant) soit de confirmer qu'il préfère un arbitre plutôt qu'un juge - arbitre ou soit de m'aviser s'il préfère un juge - arbitre.

[6] Le réclamant a en effet répondu qu'il souhaitait que la cause soit réglée par arbitrage plutôt que par renvoi. Dès le début de l'audition en personne le 13 août 2002, l'arbitre et le Conseiller du Fonds ont encore une fois invité le réclamant à repenser à sa décision et à faire juger la cause par renvoi. Le réclamant a encore une fois insisté qu'il souhaitait que la cause soit réglée par arbitrage. La cause a donc été traitée par arbitrage.

[7] Les observations écrites du Conseiller du Fonds, datées du 4 avril 2002, établissent la position de l'Administrateur. L'Administrateur reconnaît que le réclamant a été hospitalisé au Saskatoon City Hospital en décembre 1989, au moment où il a reçu une transfusion de deux unités de sang. Les dossiers de l'hôpital confirment qu'un total de 5 unités de sang ont subi l'épreuve de comptabilité croisée, c'est-à-dire qu'elles pouvaient être utilisées dans le cas du réclamant si cela s'avérait nécessaire. Cependant, seulement deux de ces unités ont réellement été transfusées au réclamant. Les dossiers de l'hôpital confirment que trois unités ont été annulées et que par conséquent, elles n'ont pas été transfusées. Une enquête de retraçage a été effectuée au sujet des deux unités qui ont en fait été transfusées au réclamant au cours de la période visée par les recours collectifs. L'enquête de retraçage a confirmé que dans chaque cas, le donneur était VHC négatif. Le médecin du réclamant indique que le réclamant a reçu des transfusions sanguines au cours de 1961 et de 1962 à la suite de trois gastrectomies partielles à Kingston en Ontario. Les transfusions sanguines reçues avant la période visée par les recours collectifs sont considérées comme étant un facteur de risque relativement au virus de l'hépatite C (VHC).

[8] On a tenu une audition en personne à Saskatoon le 13 août 2002. Le réclamant a témoigné en son propre nom et Carol Miller, coordonnatrice des renvois au Centre des réclamations (le " Centre des réclamations ") relatives à l'hépatite C (1er janvier 1986 au 1er juillet 1990), a témoigné au nom de l'Administrateur. Par conséquent, la cause sera en effet adjugée en fonction des éléments matériels et des témoignages présentés par les parties.

B. Faits et résumé de la preuve

[9] En vertu des modalités de la Convention de règlement (la " Convention de règlement ") relative à l'hépatite C (1er janvier 1986 au 1er juillet 1990) et du Régime, la période visée par les recours collectifs est la seule période où une indemnisation peut être disponible. De plus, bien qu'il existe plusieurs sources possibles d'infection au virus de l'hépatite C (" VHC "), le Régime ne permet une indemnisation qu'aux individus ayant reçu des transfusions au cours de la période visée par les recours collectifs de produits de sang définis, dont les donneurs ont été examinés et déclarés infectés par le VHC.

[10] Dans le formulaire de renseignements généraux du réclamant (TRAN 1) daté du 7 mai 2000 , le réclamant a déclaré qu'il croyait avoir été infecté par le VHC en raison d'une transfusion sanguine reçue au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs. Il a déclaré qu'il avait reçu une transfusion sanguine au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs et a candidement reconnu avoir reçu des transfusions sanguines 4 fois avant la période visée par les recours collectifs. Dans le formulaire de déclaration d'accompagnement (TRAN 3) daté du 17 mai 2000 , le réclamant a de plus déclaré que les informations étaient " véridiques " au meilleur de ses connaissances et croyances, qu'il " n'était pas infecté par le virus de l'hépatite non-A non-B ou de l'hépatite C avant le 1er janvier 1986 ". Dans la case 4 du formulaire TRAN 3, le réclamant a coché la case " vrai " à côté de la déclaration à l'effet qu'il " n'avait jamais en aucun temps utilisé des drogues injectables sans ordonnance ". Le formulaire du médecin traitant (" TRAN 2 ") a été rempli par le médecin du réclamant, le Dr R., le 10 mai 2000. La section F - case 2 " oui " a été cochée suite à l'énoncé : " Par rapport à la définition du terme sang, le réclamant a reçu une transfusion sanguine au cours de la période du 1er janvier 1986 au 1er juillet 1990 ". Le médecin a coché " non " en réponse à la question : " Le dossier médical de la personne infectée par le VHC indique-t-il que la personne a été infectée par l'hépatite non-A, non-B ou par le virus de l'hépatite C avant le 1er janvier 1986? " Dans la section F, case 1, demandant si le réclamant avait des antécédents de facteurs de risque relativement au virus de l'hépatite C autres qu'une transfusion sanguine au cours de la période visée par les recours collectifs, le médecin a coché la case indiquant " Transfusions sanguines en dehors de la période du 1er janvier 1986 au 1er juillet 1990 ". Ce formulaire indiquait également que le médecin avait connu le réclamant depuis 1983 et qu'il le traitait depuis 1998.

[11] La Pièce 2 est une lettre datée du 18 avril 2002 de la Société canadienne du sang (SCS) à Mme Miller, établissant au moyen de nombreux détails une description de la procédure d'enquête entreprise relativement au dossier du réclamant. Les deux unités de globules rouges transfusées au réclamant le 12 décembre 1989 au Saskatoon City Hospital ont été retracées par numéro d'unité et date de transfusion, suite à laquelle la lettre déclarait :

On n'a retracé aucune autre unité de sang ayant été transfusée au receveur au cours de la période visée par les recours collectifs. La SCS a fait parvenir une note de service à la banque de sang du Royal University Hospital (RUH) le 5 mars 2001 et le RUH a répondu par note manuscrite à celle de la SCS le 7 mars 2001, déclarant que, dans le cas du receveur, on avait effectué une épreuve de compatibilité croisée sur un total de cinq unités; deux ont été émises et transfusées et trois ont été annulées. Une copie de cette note est jointe.

Les numéros des unités pour les concentrés de globules rouges indiquées dans les rapports ont été saisis dans le Blood Information System (" base de données BLIS ") de la SCS, un système d'information automatisé qui retrace les informations sur les donneurs de sang. La base de données BLIS permet à la SCS de lier les numéros des unités aux donneurs de ces unités. On a retracé les donneurs reliés à chacun des numéros des unités.

On a conclu que les deux donneurs reliés aux unités transfusées au cours de la période visée par les recours collectifs ont subséquemment été déclarés VHC négatifs selon le test de détection des anticorps du virus de l'hépatite C.

[Les résultats des tests des donneurs reliés à la période visée par les recours collectifs étaient datés comme suit : 1992-06-05 et 1999-09-16 respectivement et avaient été effectués par La Société canadienne de la Croix-Rouge et Gamma Dynacare respectivement.]

Le test de dépistage que la SCS utilise afin de détecter l'anticorps de l'hépatite C à l'heure actuelle est le test du VHC par dosage immunoenzymatique 3.0 (Test du VHC EIA 3.0) qui est utilisé depuis environ juin 1996. Santé Canada a approuvé ce test de dépistage pour utilisation au Canada. Le test du VHC par dosage immunoenzymatique 2.0 était utilisé par la SCCR avant le test du VHC EIA 3.0. Au moment d'effectuer le test sur le donneur relié à l'unité no … (en utilisant le test du VHC EIA 2.0), la SCCR exploitait le système de sang au Canada et a testé le donneur… Pour les fins de son programme d'enquêtes de retraçage, la SCS s'appuie sur le test du VHC EIA 2.0 et le test du VHC EIA 3.0.

Pour les fins de la présente enquête de retraçage, la SCS s'appuie également sur les résultats du test effectué par Gamma Dynacare relativement au donneur relié à l'unité no… Gamma Dynacare a confirmé qu'au moment du test du (dit) donneur, le laboratoire utilisait le test du VHC EIA 3.0.

Le test de dépistage du VHC EIA est extrêmement sensible et parfois détecte des réactions chez des individus en santé qui n'ont pas d'infection (" faux positif ".) Si un ou l'autre des tests de dépistage détecte une réaction qui pourrait indiquer une infection, on effectue un autre test pour clarifier le résultat. Les tests de dépistage effectués sur le donneur relié au don durant la période des recours collectifs se sont avérés négatifs. Par conséquent, aucun test de confirmation n'était requis.


[11] La Pièce 3 comprend une série d'ordonnances médicales reliées à l'hospitalisation du réclamant au Saskatoon City Hospital en décembre 1989, tel que fournie par le réclamant. Avant l'audition, le réclamant avait eu de la difficulté à obtenir certains rapports de laboratoire qu'il tentait d'obtenir auprès de son médecin. Conséquemment, l'arbitre a écrit au médecin du réclamant, le Dr R., avec le consentement du réclamant, lui demandant des copies de tels dossiers. La réponse du Dr R. datée du 29 juillet 2002 et comprenant des copies jointes de rapports de laboratoire et de consultation du spécialiste en maladies infectieuses du réclamant ont été présentés collectivement comme Pièce 4. Enfin, M. Callaghan a présenté comme Pièce 5 une mise à jour médicale de la Fondation canadienne du foie concernant l'hépatite C qui présente les sources possibles d'infection du VHC, accompagnée de la déclaration suivante : " Dans 10 % des cas d'hépatite C, selon des données américaines, on ne peut retracer la source d'infection. "

[12] Mme Miller a témoigné relativement au processus utilisé pour évaluer le dossier du réclamant, y compris l'obligation du réclamant d'établir : (a) la preuve qu'il a reçu des produits sanguins au cours de la période visée par les recours collectifs (ce que le réclamant a réussi à faire) et; (b) une enquête de retraçage produisant un résultat positif (ce que le réclamant n'a pas réussi à faire). Elle a de plus témoigné relativement au protocole relatif à la procédure d'enquête tel qu'approuvé par le tribunal. Parfois, un réclamant obtient ses propres dossiers de santé avec les numéros d'unités qui y étaient inscrits ou on peut demander à la SCS de produire des dossiers de banque de sang. On peut effectuer des enquêtes de retraçage seulement lorsqu'un réclamant est VHC positif selon le test. La SCS peut entrer dans le système pour accéder à l'information au sujet des donneurs - p. ex., ont-ils été déclaré VHC positifs ou non? S'il n'y a pas de dossiers d'une manière ou d'une autre, la SCS retrace le donneur et fait les arrangements requis pour le test. Dans le cas présent, la SCS avait testé les deux donneurs qui se sont avérés tous les deux VHC négatifs. Même si un des tests a été effectué en 1999, l'anticorps du VHC serait toujours présent dans le système du donneur, si jamais il s'était avéré VHC positif. Si le donneur n'avait pas d'anticorps en 1999, il n'avait alors jamais été atteint du virus auparavant. Dans le cas présent, Saskatchewan Health a écrit au réclamant le 6 octobre 1997, indiquant que selon les dossiers, ce dernier avait reçu des produits de sang avant 1990 qui auraient pu avoir été infectés par le VHC et l'a invité à subir des tests de détection du VHC.

[13] Mme Miller a de plus témoigné en rapport avec les trois unités de sang réservées (ou mises de côté au besoin) pour le réclamant le 3 décembre 1989, mais elle a souligné que selon les dossiers spécifiques, ces unités ont été annulées le 5 décembre 1989, indiquant que le réclamant n'en avait pas eu besoin. Elle a aussi fait des commentaires au sujet des ordonnances du médecin fournies par le réclamant. Ces notes indiquent qu'il y a d'abord eu une ordonnance du médecin traitant de transfuser 2 unités de sang le 5 décembre 1989, mais qu'il y a eu une annulation de cette ordonnance par la suite, ce qui est également indiqué dans les dossiers des tests de laboratoire et les notes des infirmières, dans lesquelles les codes à barres pour les deux unités de sang qui, de fait, ont été transfusées, font partie de la fiche. Les codes à barres sont enlevés des unités de sang et placés sur le graphique de circulation et les notes des infirmières. Le résumé de la transfusion indique des résultats d'enquête de retraçage négatifs par rapport aux deux unités de sang transfusées au réclamant, et indique également que les 3 unités de sang ne l'étaient pas, ce qui est parfaitement conforme à ce qu'elle avait vu dans les dossiers sur l'épreuve de compatibilité croisée et dans les ordonnances de médecin fournies par le réclamant. Si on avait inscrit un numéro d'unité erroné, il n'aurait pas été conforme aux dossiers de la banque de sang. Nonobstant ces résultats, le Centre a voulu confirmer les résultats obtenus et a encore une fois communiqué avec la coordonnatrice des enquêtes de retraçage qui a réécrit afin de confirmer qu'on avait vérifié de nouveau dans la banque de sang et la fiche du patient et que les résultats étaient les mêmes. La SCS a écrit à la banque de sang pour qu'elle vérifie les dossiers et qu'elle indique par écrit toutes les unités reçues. Si l'un ou l'autre des donneurs avait été VHC positif, le réclamant en aurait été avisé. Cependant, dans le cas présent, étant donné que les deux donneurs s'étaient avérés VHC négatifs selon le test, on n'a rien signalé dans le dossier du réclamant. Il a donc reçu la lettre de Saskatchewan Health en même temps que tout le monde. Dans ce cas, en examinant la Pièce 2, Mme Miller a noté que la SCS n'avait pas eu à retracer les donneurs puisqu'ils avaient déjà été testés, étant donné que ces mêmes donneurs avaient fourni du sang après la transfusion au réclamant et qu'alors, leur sang avait déjà été testé et s'était avéré VHC négatif.

[14] Mme Miller a également noté que le médecin de famille du réclamant, le Dr R., avait retracé 3 transfusions antérieures possibles au réclamant en 1961 et en 1962 relativement à 3 gastrectomies partielles dans un hôpital à Kingston.

[15] L'arbitre a demandé à Mme Miller s'il était probable que le réclamant ait été infecté par le VHC en 1961 ou 1962 mais qu'il soit demeuré asymptomatique pendant près de 30 ans. Mme Miller a noté que le test le plus récent des donneurs est la méthode de test la plus fiable disponible. Elle a également noté que 80 % des personnes infectées manifestent des symptômes mais que 20 % n'en manifestent pas. En d'autres mots, la plupart des personnes qui sont infectées pourraient en devenir malades en deçà de 20 ans, mais que si une personne se situait dans l'autre catégorie, ce ne serait pas nécessairement le cas. Elle a aussi indiqué que dans environ 10 % des cas, la source de l'infection ne pouvait être détectée.

[16] Le réclamant a témoigné en son propre nom. Il a 72 ans. Il a déclaré qu'à l'heure actuelle, son foie semble en bon état. Il a eu des problèmes liés à des calculs rénaux en 1988 alors qu'il a subi une intervention chirurgicale à l'hôpital de l'Armée du Salut à Winnipeg, ce qui a laissé une grande cicatrice. Il ne se souvient pas d'avoir eu des transfusions à ce moment-là, mais comme il avait été sous anesthésie générale, il ne peut en être sûr. Il a également subi une intervention chirurgicale pour l'appendicite à la fin des années 1940 ou au début des années 1950. Il se souvient qu'il y a eu un écart de temps important entre la chirurgie pour l'appendicite et celles des gastrectomies. Il se souvient avoir été atteint de tuberculose lorsqu'il avait travaillé dans les Territoires du Nord-Ouest au début des années 1960 et il s'est retrouvé à l'hôpital à Edmonton durant une période d'environ 7 mois.

[17] À la fin de l'audition, on a discuté de la chirurgie et de l'hospitalisation du réclamant à l'hôpital de l'Armée du Salut à Winnipeg en 1988. Étant donné la nature de la chirurgie qui a eu lieu au cours de la période visée par les recours collectifs et afin de tout vérifier en fonction de la demande d'indemnisation du réclamant, on a cru bon de prendre des mesures afin de déterminer si le réclamant avait ou non reçu des produits sanguins lors de son séjour à l'hôpital à Winnipeg. On a donc décidé de prendre les mesures suivantes :

(a) Il a été décidé que l'arbitre écrirait au médecin traitant actuel du réclamant, le Dr R.,
lui demandant des copies de tout dossier qu'il aurait peut-être en sa possession relativement à l'hospitalisation du réclamant à Winnipeg;
(b) Mme Miller communiquerait avec le Centre de sang de Winnipeg afin de retracer tout dossier qui indiquerait si le réclamant avait reçu des produits sanguins à ce moment-là;
(c) Toute réponse reçu suite aux démarches précitées pourrait être admise comme preuve, à condition que les deux parties aient l'occasion de fournir d'autres observations en rapport avec ces réponses, si elles en étaient avisées.

[18] Le 15 août 2002, l'arbitre a écrit au Dr R., comme suit :

Vous avez eu l'amabilité d'inclure des copies des rapports de consultation du Dr W. (spécialiste en maladies infectieuses). Dans sa lettre du 2 avril 1998, le Dr W. dit par rapport (au réclamant), "…il semble qu'il a été exclu de travailler dans les camps dans le Nord parce qu'il avait un problème de foie en 1992 ". Comme je crois comprendre que (le réclamant) n'a pas consulté le Dr W. avant 1998, je prends pour acquis que vous étiez le médecin (du réclamant) en 1992. Si vous avez des renseignements en dossier sur des problèmes de foie dont (le réclamant) a pu souffrir en 1992 ou en tout autre temps à part ceux mentionnés par le Dr W. ou d'autres renseignements en dossier qui pourraient jeter de la lumière sur les commentaires du Dr W. à cet égard, je vous en saurais gré de me les faire parvenir.

Enfin, je crois comprendre que (le réclamant) a subi une intervention rénale à l'hôpital de l'Armée du Salut à Winnipeg en 1988. Si jamais vous aviez des copies de tout dossier de santé relatif à cette chirurgie ou hospitalisation, j'apprécierais de recevoir des copies de ces informations également….

[19] Le Dr R. a déclaré dans une lettre en date du 26 août 2002 :

… Selon l'histoire, (le réclamant) aurait, semble-t-il, informé le Dr W. qu'il " ne pouvait pas travailler dans les camps du Nord parce qu'il avait des problèmes de foie en 1992." J'ai trouvé une note clinique du service d'urgence de l'hôpital de St. Paul datée du 12 septembre 1992. Le diagnostic à cette date faisait état d'une intoxication à l'alcool et une copie du rapport de ce service d'urgence est jointe. Je note qu'il a subi des tests de fonction hépatique (phosphates alcalins, SGPT, etc.). Les résultats n'étaient pas disponibles dans sa fiche … Ses tests de fonction hépatique d'octobre 1990 semblaient normaux et une copie des résultats sanguins est jointe.

Quant aux antécédents de chirurgie rénale à l'hôpital Grace de l'Armée du Salut de Winnipeg en 1988, sa fiche ne contient aucun dossier de santé touchant cette admission.

[20] Par voie d'une lettre en date du 23 septembre 2002, Marie - Josée Dumouchel, coordonnatrice de la notification des litiges à la SCS, a écrit à Mme Sarah Gallant, coordonnatrice des enquêtes de retraçage au Centre des réclamations précisant :

La présente est en réponse à votre correspondance en date du 13 août 2002 dans laquelle vous avez demandé à la SCS de vérifier auprès de l'Hôpital général Grace si le réclamant précité avait reçu une transfusion sanguine en 1988.

La SCS a demandé et a examiné la confirmation du dossier d'hospitalisation (" HRC " ) de l'Hôpital général Grace. La documentation indique que le dossier du patient est disponible et que le malade n'a pas reçu de transfusion durant son séjour à l'hôpital en 1988. Le personnel de l'hôpital ne dispose d'aucune autre mention de transfusions…

[21] L'arbitre a écrit aux parties le 8 octobre 2002 afin des les inviter à fournir toutes observations additionnelles qu'elles souhaiteraient faire, à la suite des renseignements supplémentaires du Dr R. ou de ceux présentés récemment par la SCS concernant l'admission du réclamant à l'Hôpital général Grace en 1988. Le réclamant a avisé l'arbitre par téléphone le 10 octobre 2002 précisant qu'il ne souhaitait pas présenter d'autres observations supplémentaires relativement à sa réclamation. M. Callaghan n'a présenté aucunes autres observations.

C. Analyse

[22] Les faits substantiels dans ce cas sont les suivants :

(a) Le réclamant est infecté par le virus de l'hépatite C.
(b) La source probable d'une telle infection n'a pas été établie comme preuve.
(c) Même si le réclamant a reçu une transfusion de deux unités de concentrés de globules rouges au Saskatoon City Hospital en décembre 1989, l'enquête de retraçage a démontré que dans chaque cas, le donneur s'était avéré VHC négatif selon les tests les plus avancés disponibles à l'époque, à savoir les tests du VHC EIA 2.0 et 3.0 respectivement.
(d) Le réclamant n'a pas reçu de produits sanguins durant son hospitalisation en août 1988 à l'Hôpital général Grace de Winnipeg, même si deux unités de globules rouges avaient été soumises à l'épreuve de compatibilité croisée à son intention, au cas où ce serait requis.
(e) En conséquence, même si le réclamant avait établi qu'il avait reçu une transfusion des produits sanguins à Saskatoon durant la période visée par les recours collectifs, il a été incapable d'établir que ni l'un ni l'autre des donneurs de tels produits était infecté par le virus.

[23] Il n'y a aucune preuve indiquant que l'Administrateur n'avait pas suivi le protocole approuvée par le tribunal relativement aux critères de la procédure d'enquête pour les personnes directement infectées par le VHC. Ayant procédé ainsi, il a dû appliquer les dispositions du Régime qui prévoit ce qui suit :

3.04 Procédure d'enquête

(1) Malgré toute autre disposition du présent régime, si les résultats d'une procédure d'enquête démontrent que…aucun des donneurs ou unités de sang reçues par une personne directement infectée ou une personne directement infectée …au cours de la période visée par les recours collectifs n'est ou n'était pas anti-VHC positif, sous réserve des dispositions du paragraphe 3.04(2), l'Administrateur doit rejeter la réclamation …

(2) Le réclamant peut prouver que la personne directement infectée…a été infectée pour la première fois par le VHC par suite d'une transfusion de sang reçue au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs… en dépit des résultats de la procédure d'enquête. Il est précisé pour plus de certitude que les frais d'obtention de la preuve visant à réfuter les résultats d'une procédure d'enquête sont à la charge du réclamant, sauf décision contraire d'un juge arbitre, d'un arbitre ou d'un tribunal.
[c'est nous qui soulignons]

[24] À cet effet, l'arbitre tient compte d'autres décisions qui portent sur la présente question, y compris :

Décision de juge - arbitre no 29 confirmée - le 6 février 2002, John P. Sanderson, c.r., juge - arbitre, tel que maintenue le 14 juin 2002 par la décision du tribunal ayant compétence en matière de recours collectifs (Monsieur le juge Pitfield.)

Décision d'un arbitre no 54 - le 15 août 2002, Vincent R.K. Orchard, arbitre

[25] Le Conseiller du fonds a candidement reconnu qu'il n'y a eu aucun cas d'arbitre / juge - arbitre ou de tribunaux à ce jour ayant permis à un réclamant de " prouver qu'il avait été infecté par le VHC, par suite à une transfusion sanguine reçue au Canada durant la période visée par les recours collectifs, malgré les résultats de la procédure d'enquête. " Du point de vue d'un arbitre, la question qui est troublante est celle de savoir comment un réclamant peut réussir à faire inverser la charge de la preuve imposée par le paragraphe 3.04(2) du Régime, étant donné qu'il lui est impossible d'accéder aux dossiers privés du donneur. Cela demeure une question à régler plus tard, étant donné qu'on n'a produit aucune preuve jusqu'à maintenant dans cette cause qui pourrait permettre à un arbitre de conclure que le réclamant a " réfuté les résultats de la procédure d'enquête ". Cela doit être doublement frustrant pour le réclamant, dû au fait que non seulement il a établi qu'il avait reçu des produits sanguins durant la période visée par les recours collectifs alors qu'il était hospitalisé au Saskatoon City Hospital en décembre 1989, mais qu'il a également réussi à établir que ces produits sanguins avaient en fait subi le test de compatibilité croisée et avaient été mis de côté à son intention durant son hospitalisation à l'Hôpital général Grace de Winnipeg, en août 1988, également durant la période visée par les recours collectifs. Cependant, il a malheureusement été incapable d'établir que les concentrés de globules rouges reçus au Saskatoon City Hospital étaient infectés par le VHC ou qu'il avait reçu des produits sanguins à Winnipeg.

[26] Le réclamant a fourni ses preuves de façon très franche et directe. Il n'y a aucun doute quant à sa sincérité de croire qu'il a été infecté par le VHC suite aux transfusions au Saskatoon City Hospital. Son honnêteté et son intégrité tout au long de ce processus méritent seulement du respect et de l'admiration. Bien qu'on ait été très tenté de vouloir aider le réclamant, si les preuves nous avaient permis de le faire dans ce cas, il n'y avait tout simplement pas de preuves présentées permettant de modifier les conclusions de ce processus. En outre, l'arbitre a beaucoup apprécié les efforts du Centre à retracer les dossiers du réclamant à Winnipeg, nonobstant le fait que ce dernier ne les avait pas initialement mentionnés à l'appui de sa demande et seulement parce qu'ils sont devenus un enjeu possible après avoir entendu les preuves du réclamant lors de l'audition en personne. L'arbitre reconnaît que le Centre ne cherchait pas des moyens de refuser la demande d'indemnisation du réclamant, mais au contraire, de coopérer pleinement afin de s'assurer qu'on explore toutes les avenues d'indemnisation possibles en faveur du réclamant, conformément au Régime.

[27] Le renvoi doit être rejeté. Le réclamant n'est pas en droit de recevoir une indemnisation. L'Administrateur doit évaluer chaque demande et déterminer si oui ou non la preuve requise existe en faveur d'une indemnisation. L'Administrateur n'a aucun pouvoir discrétionnaire d'autoriser une indemnisation s'il n'existe aucune preuve. La suffisance financière du Fonds dépend de la capacité de l'Administrateur d'investiguer chaque demande et de déterminer exactement si le réclamant est admissible. De façon semblable, un arbitre n'a également aucune compétence de modifier, d'élargir ou d'ignorer les dispositions de la Convention de règlement ou du Régime, ou d'étendre ou de modifier sa couverture, y compris inverser la charge de la preuve tel que prévu au paragraphe 3.04(2) du Régime.

D. Décision

[28] Après avoir examiné avec soin la Convention de règlement, le Régime, les ordonnances des tribunaux et les preuves soumises par écrit et de vive voix, je maintiens le refus de la demande d'indemnisation du réclamant par l'Administrateur.

FAIT à Saskatoon, Saskatchewan, ce 1er jour de novembre 2002.

________________________________
DANIEL SHAPIRO, c.r.
Arbitre


 

Déni de responsabilité