Renvois : Décisions
homologuées par le juge-arbitre : #56 - Le 5 septembre
2002
D É C I S I O N
A. Introduction
[1] Le réclamant a présenté une demande
d'indemnisation à titre de personne directement infectée
dans le cadre du Régime à l'intention des transfusés
infectés par le VHC (" le Régime ").
[2] Le réclamant avait fourni à l'Administrateur
une preuve suffisante à l'appui de sa réclamation,
à savoir qu'il avait reçu du sang au cours de
la période du 1er janvier 1986 au 1er juillet 1990
(" la période visée par les recours collectifs
").
[3] Cependant, dans une lettre en date du 3 mai 2002, l'Administrateur
a refusé la réclamation après avoir soigneusement
examiné avec l'aide d'un comité de trois (3)
évaluateurs supérieurs les pièces soumises
à l'appui de celle-ci, pour les raisons suivantes :
Les résultats de votre enquête de retraçage
des donneurs a confirmé que le donneur de l'unité
de sang qui vous a été transfusée au
cours de la période visée par les recours collectifs
s'est avéré VHC négatif lors du test
à cet effet. À la lumière de cette information,
votre réclamation a été refusée.
Vous avez indiqué dans votre réponse à
notre première lettre que vous enverriez d'autres preuves.
Les informations que vous avez soumises ont été
examinées et n'ont pas influencé positivement
les résultats précédents de votre enquête
de retraçage des donneurs. Vous avez fait parvenir
une lettre en date du 19 mars 2002 dans laquelle vous demandiez
à l'Administrateur de prendre une décision finale
relativement à votre réclamation. Ainsi, selon
l'article 3.04 du Régime à l'intention des transfusés
de la Convention de règlement relative à l'hépatite
C (1986-1990), vous ne répondez pas aux critères
d'indemnisation et votre réclamation est refusée.
[4] En date du 24 mai 2002, , le réclamant a demandé
de saisir un arbitre / juge - arbitre ( " avis de renvoi
" ) du refus de sa réclamation par l'Administrateur.
Au paragraphe 4 de son avis de renvoi, le réclamant
a indiqué qu'il souhaitait un renvoi de la décision
de l'Administrateur pour les raisons suivantes :
Ma réclamation a été refusée,
et même si les résultats de l'enquête de
retraçage des donneurs se sont avérés
négatifs, j'ai de l'information qui dit clairement
que l'hépatite C peut être transmise par l'albumine.
Le Centre des réclamations ne le reconnaît pas
parce que l'albumine est trop difficile à détecter.
J'ai pu découvrir que l'unité que j'ai reçue
provenait de Cutter Pharmaceuticals qui appartient maintenant
à la société Bayer. J'ai retracé
l'unité au moyen de l'Internet
[5] Le réclamant a avisé qu'il souhaitait saisir
un juge - arbitre plutôt qu'un arbitre et a demandé
une audience en personne.
[6] À la demande du juge-arbitre, chaque partie a
accepté avec bienveillance de fournir des arguments
par écrit, à l'avance.
[7] Voici certains extraits pertinents des arguments du réclamant
soumis par écrit :
Après des mois de remplissage de formulaires et de
visites chez les médecins, j'ai commencé à
obtenir de l'information à l'effet que ma réclamation
progressait, et que l'on effectuerait une enquête de
retraçage des donneurs, et que j'aurais des nouvelles
d'eux bientôt. J'ai continué à téléphoner
au Centre des réclamations pour avoir une mise à
jour de la situation et chaque fois que je téléphonais,
j'obtenais la même réponse : " Nous attendons
les résultats de l'enquête de retraçage
des donneurs " ou " Nous attendons que l'information
soit lue optiquement ". Enfin, au mois d'août 2001,
j'ai reçu une lettre par courrier me disant qu'on avait
reçu les résultats de l'enquête et que
selon le test, le donneur était VHC négatif.
Pendant tout ce temps, on me disait que je devrais fournir
d'autres preuves ou que ma réclamation serait rejetée.
J'ai rédigé une lettre avisant le Centre des
réclamations que VOUS POUVEZ EN EFFET ÊTRE
INFECTÉ PAR LE VIRUS DE L'HÉPATITE C EN UTILISANT
DE L'ALBUMINE
Je n'ai pas demandé d'avoir cette maladie. J'ai eu
la malchance d'avoir reçu par injection des produits
sanguins de la Société canadienne de la Croix-Rouge
(maintenant appelée la Société canadienne
du sang), qui est le seul organisme responsable de la collecte
et de l'entreposage du sang total et de nombreux autres produits
du sang, y compris l'albumine.
Annexe A, article 1.01, définitions, Régime
à l'intention des transfusés infectés
par l'hépatite C, Convention de règlement relative
à l'hépatite C (1986-1990).
On explique très soigneusement les définitions,
jusqu'à la rubrique SANG. CITATION :
" Sang " signifie le sang total et les produits
sanguins suivants : les concentrés de globules
rouges, les plaquettes, le plasma
et les globules blancs.
Le sang ne comprend pas l'albumine à 5 %, l'albumine
à 25 %, le facteur VIII et la liste continue.
Au début de la citation ci-dessus, on indique clairement
PRODUITS SANGUINS. Puis, quelques lignes plus bas,
on omet 20 produits sanguins sur 24 produits possibles qu'ils
ont énumérés dans la Convention de règlement
.
Je crois que la Société canadienne de la Croix-Rouge
est le seul organisme responsable du fait que j'ai été
infecté par l'hépatite C, et en refusant ma
réclamation parce qu'il est trop difficile de retracer
l'albumine, en raison des nombreux donneurs, est tout
simplement de la paresse de sa part. Le fait que la société
considère qu'il est trop difficile de faire quelque
chose ne justifie pas le refus de ma réclamation. La
Société canadienne de la Croix-Rouge m'a donné
cette maladie avec laquelle je devrai vivre pour le reste
de ma vie, et même si je n'ai pas contracté la
maladie au moyen de sang contaminé, je l'ai eue à
travers un autre de ses produits sanguins. Il n'y a absolument
rien dans mon passé qui m'aurait mis à risque,
puisque je n'ai pas reçu de produits sanguins. Clairement,
la Convention de règlement relative à l'hépatite
C (1986-1990) me place au niveau 3
.
[c'est le réclamant qui a souligné]
[8] Les arguments soumis par écrit du conseiller du
Fonds, transmis le 30 juillet 2002, établissent la
position de l'Administrateur. L'Administrateur admet que le
réclamant a reçu une unité de sang à
l'hôpital général d'Hanna en Alberta le
15 octobre 1988 (durant la période visée par
les recours collectifs). Cependant, l'enquête de retraçage
de l'unité de sang a démontré que le
donneur de ce sang était VHC négatif. Par conséquent,
le sang reçu par le réclamant le 15 octobre
1998 n'était pas infecté par le virus de l'hépatite
C. L'Administrateur a également reconnu que le réclamant
avait reçu une unité d'albumine à 25
% de l'hôpital général d'Hanna. En outre
cependant, l'Administrateur s'appuie à cet égard
sur la définition de " sang " du Régime
qui se lit comme suit :
" Sang " signifie le sang total et les produits
sanguins suivants : les concentrés de globules rouges,
les plaquettes, le plasma (frais congelé et stocké)
et les globules blancs. La définition de sang NE comprend
PAS :
l'albumine à 5 %, l'albumine à 25 %,
le facteur VIII, le facteur VIII porcin, le facteur IX, le
facteur VII, l'immunoglobuline anti-cytomégalovirus,
l'immunoglobuline anti-hépatitique B, l'immunoglobuline
anti RH, l'immunoglobuline antivaricelleuse-antizostérienne,
l'immunoglobuline sérique, (FEIBA), FEVII Inhibitor
Bypassing Activity, Autoplex (complexe prothrombine), l'immunoglobuline
antitétanique, l'immunoglobuline intraveineuse (IVIG)
et l'antithrombine III (ATIII).
[soulignement ajouté]
[9] Une audience en personne a été tenue à
Saskatoon le 13 août 2002. Le réclamant a témoigné
en son propre nom et Carol Miller, coordonnatrice des renvois
(appels) du Centre des réclamations (le " Centre
des réclamations ") relatives à l'hépatite
C (1er janvier 1986 - 1er juillet 1990), a témoigné
au nom de l'Administrateur. En fin de compte, l'affaire sera
en effet jugée en se basant sur les arguments soumis
par écrit et les témoignages des deux parties.
B. Faits, résumé de la preuve
[10] En vertu des modalités de la Convention de règlement
(la " Convention de règlement) relative à
l'hépatite C (1er janvier 1986 - 1er juillet 1990),
la période visée par les recours collectifs
est la seule période durant laquelle une indemnisation
peut être disponible. De plus, bien qu'il existe plusieurs
sources possibles d'infection reliées au virus de l'hépatite
C (" VHC "), le Régime ne prévoit
une indemnisation que pour les individus qui ont reçu
des transfusions de produits sanguins définis
au cours de la période visée par les recours
collectifs.
[11] Le dossier du Centre des réclamations, comprenant
93 pages, a été présenté comme
Pièce 1 lors de l'audience. Dans le formulaire de renseignements
généraux à l'intention du demandeur (TRAN
1) en date du 22 août 2000, le réclamant a déclaré
qu'il croyait avoir été infecté par le
VHC au moyen d'une transfusion sanguine reçue au Canada
et qu'il avait reçu 3 transfusions sanguines au cours
de la période visée par les recours collectifs.
Dans son formulaire de déclaration d'accompagnement
(TRAN 3) en date du 28 août 2000 , le réclamant
a déclaré qu'au meilleur de ses connaissances,
informations et croyances, il avait résidé en
Alberta au cours de la période visée par les
recours collectifs. En outre, le réclamant a déclaré
qu'au meilleur de ses connaissances, informations et croyances,
il était "vrai qu'il n'était pas infecté
par l'hépatite non-A non-B ou le virus de l'hépatite
C avant le 1er janvier 1986 ". Dans la case 4 du formulaire
TRAN 3, le réclamant a coché la case "
vrai " à côté de la déclaration
à l'effet qu'il " n'avait jamais utilisé
de drogues intraveineuses vendues sans ordonnance ".
Le formulaire du médecin traitant (" TRAN 2 ")
a été rempli par le médecin du réclamant
le 8 août 2000. La case 2 de la section F a été
cochée comme " oui " à la suite de
l'énoncé : " Par rapport à la définition
de sang, le réclamant a reçu une transfusion
sanguine au cours de la période du 1er janvier 1986
au 1er juillet 1990 ". Le médecin a coché
la case " non " en réponse à la question
: " Le dossier médical de la personne infectée
par le VHC indique-t-il de quelque façon qu'elle a
été infectée par l'hépatite non-A,
non-B ou par l'hépatite C avant le 1er janvier 1986?
" Dans la case 1 de la section F, à savoir si
le réclamant avait des antécédents de
facteurs de risque relativement au virus de l'hépatite
C autres qu'une transfusion sanguine au cours de la période
visée par les recours collectifs, le médecin
traitant a coché la case indiquant " chirurgies
ou traumatisme antérieurs importants ". Ce formulaire
a également indiqué que le médecin traitant
connaissait le réclamant depuis le 6 mars 2000.
[12] La Pièce 2 est une lettre en date du 1er août
2002 de la Société canadienne du sang (SCS)
à M. Callaghan, attestant que le pourcentage d'albumine
transfusé au réclamant, par numéro de
lot et manufacturier (Cutter), était de l'albumine
à 25 %. La Pièce 3 est une lettre en date du
29 juillet 2002 de la SCS à Mme Miller établissant
les menus détails de la procédure d'enquête
entreprise relativement au dossier du réclamant. L'unité
de cellules sanguines rouges transfusée au réclamant
le 15 octobre 1988 à l'hôpital général
d'Hanna a été identifiée par le numéro
d'unité et la date de transfusion. On a fait de même
pour l'albumine transfusée au réclamant à
l'hôpital général d'Hanna le 15 octobre
1988. Puis, la lettre confirme :
Nulle autre unité n'a été identifiée
dans les rapports sur les IRT (Rapports sur les infections
reliées à des transfusions) comme ayant été
transfusée au récipiendaire au cours de la période
visée par les recours collectifs. La SCS a confirmé
auprès de l'hôpital général d'Hanna
que c'était de l'albumine à 25 %. La SCS n'effectue
pas d'investigation de retraçage des donneurs sur l'albumine.
Le dossier de la banque de sang de l'hôpital Foothills
indiquait que trois unités ont subi l'épreuve
de compatibilité croisée relativement au récipiendaire.
Veuillez noter que le rapport sur les IRT reçu de l'hôpital
Foothills (ci-joint) indique que le récipiendaire n'a
reçu aucune transfusion
Suite à la réception de l'information sur les
transfusions de récipiendaires en provenance des hôpitaux,
la SCS de Calgary entre le numéro de l'unité
transfusée comme étant l'unité no
dans le système de données sur le sang de la
SCS (" base de données BLIS "), un système
informatique de suivi des données sur les donneurs
de sang. La base de données BLIS permet à la
SCS de relier les numéros des unités à
leurs donneurs. Le donneur relié à l'unité
a été identifié.
Il fut décidé que le donneur relié à
l'unité no
, transfusée au cours de la
période visée par les recours collectifs, s'est
subséquemment avéré VHC négatif
suite à un test à cet effet. [Les résultats
de tests les plus récents du donneur reliés
à la période des recours collectifs étaient
datés de 1996-10-31.]
Le test de dépistage que la SCS utilise présentement
pour détecter les anticorps de l'hépatite C
est celui du dosage enzyme immunologique 3.0 du VHC, qui est
utilisé depuis environ le mois de juin 1996. Santé
Canada a approuvé l'utilisation de ce test de dépistage
au Canada. Lorsque le test a été administré
au donneur relié à l'unité no
,
c'est la Société canadienne de la Croix-Rouge
(SCCR) qui exploitait le système de sang au Canada
et qui a testé le donneur
Le test de dépistage du VHC par dosage enzyme immunologique
est extrêmement sensible et détecte occasionnellement
des réactions chez les individus qui ne sont pas infectés
(" résultats faux positifs ") Si l'un ou
l'autre des tests de détection démontre une
réaction qui pourrait indiquer une infection, on effectue
un autre test de confirmation afin de clarifier le résultat.
Les tests de détection effectués dans le cas
du donneur relié au don fait durant la période
visée par les recours collectifs se sont avérés
négatifs. Par conséquent, aucun test de confirmation
n'était requis.
[11] La Pièce 4 est une lettre rédigée
par le Dr J. J. Changela et fournie par le réclamant,
en date du 21 mai 2002, qui dit :
Je soigne ce patient. Il est infecté par le virus
de l'hépatite C et a subi une série complète
de traitements fournis par le Dr Sylwestrowicz. Il est maintenant
en rémission.
L'hépatite C peut être transmise au moyen
de produits sanguins, d'injections d'albumine par voies
intraveineuses et par d'autres voies de transmission importantes
[c'est nous qui soulignons]
[12] Mme Miller a témoigné à l'effet
que l'albumine est un constituant dérivé du
sang fabriqué par des établissements pharmaceutiques
comme Cutter et Bayer, à partir de protéine
de sang fournie par de nombreux donneurs. Elle ne requiert
pas d'épreuve de compatibilité croisée
et fournit rapidement des solutions utiles. Elle est entreposée
dans ce qui semble être de vieilles bouteilles de soluté.
Alors que la question est discutable, il y a beaucoup de preuves
médicales à l'appui du fait que l'albumine ne
soit pas un agent de transmission du VHC. À cet égard,
Mme Miller a fait référence à la décision
d'arbitre no 23 du 23 novembre 2001 de l'arbitre Vincent Orchard
qui résume le témoignage donné lors de
cette audience par le Dr G.H. Growe, chef de la Division de
l'hématopathologie et directeur médical des
Services de transfusion de sang au Vancouver General Hospital
and Health Sciences Centre. Au paragraphe 13, la décision
se lit comme suit :
le Dr Growe a admis qu'il n'est pas absolument impossible
que l'albumine aurait pu être infectée par le
virus et le montant d'albumine administré pourrait
ne pas être pertinent; cependant, l'albumine est un
produit sanguin qui n'est pas connu comme étant relié
à l'hépatite C ou à tout autre virus
transmis.
Il croit qu'étant donné que
l'albumine et la streptokinase ont été utilisées
et vendues partout au Canada, s'il y avait eu des poussées
épidémiques de virus chez les patients à
qui on a administré ces produits, elles auraient été
portées à l'attention du public ou auraient
été cause d'enquête.
[13] Lors de l'examen de la Pièce 2, Mme Miller a
souligné que l'hôpital d'Hanna avait en effet
confirmé que le réclamant avait reçu
une unité de 100 ml provenant d'un lot numéroté
spécifié contenant de l'albumine à 25
% le 15 octobre 1988. Le rapport sur les IRT confirme que
le réclamant a également reçu du concentré
de globules rouges à la même date provenant d'un
donneur qui s'est avéré VHC négatif à
la suite d'un test à cet effet.
[14] En contre-interrogatoire, le réclamant a exprimé
ses préoccupations quant à ce qu'il a perçu
comme des délais anormaux de la part du Centre à
effectuer l'enquête de retraçage des donneurs.
Mme Miller a fait référence au Protocole approuvé
par le tribunal contenant les critères portant sur
la procédure d'enquête qui accorde un délai
de six mois. Dans le présent cas, on n'a pas commencé
à calculer la période de temps avant que le
Centre ait eu en main tous les renseignements dont il avait
besoin. Dans le présent cas le médecin du réclamant
avait coché la case du formulaire TRAN2 qui indiquait
" importantes chirurgies ou traumas préalables
". En outre, une cheville fracturée et le remplacement
d'une hanche brisée subi par le réclamant constituaient
des facteurs de risque. Il a donc fallu effectuer une autre
investigation.
[15] Le réclamant a également demandé
à Mme Miller comment il était possible de conclure,
à partir du test de 1996 du donneur du concentré
de globules rouges en question, que ce dernier n'était
pas infecté par le virus au moment de la transfusion
en 1988. Il a demandé que le donneur subisse un nouveau
test. Mme Miller a répondu que si le donneur était
exempt de l'anticorps du virus en 1996, il ou elle n'avait
donc jamais été infecté (e ) par le virus
auparavant. Un nouveau test administré au donneur serait
maintenant inutile, car même si le donneur s'était
maintenant avéré VHC positif, cela n'affecterait
aucunement son statut à cet effet en 1996 ou plus tôt.
[16] Dans son témoignage, le réclamant a indiqué
que lorsqu'il avait 4 ans, il avait été renversé
par une voiture que sa soeur avait alors désembrayée,
ce qui avait lui nécessité une chirurgie plastique
au visage. Il a témoigné également que
le 15 octobre 1988, alors qu'il était employé
de pipelines près de l'hôtel d'Hanna et qu'il
conduisait un véhicule en route vers Drumheller, on
lui avait rapporté subséquemment qu'il s'était
endormi au volant et qu'il avait subi de sérieuses
blessures. Il ne s'est souvenu de rien durant son hospitalisation
à Hanna. Il se souvient qu'il s'était réveillé
dans l'ambulance aérienne en route vers l'hôpital
Foothills de Calgary. Il est demeuré à l'hôpital
durant 6 semaines souffrant d'une facture du côté
droit du bassin et de la hanche (ce qui a requis la pose de
6 vis), d'une paralysie partielle et d'une fracture à
la main et au pied. On lui a remplacé les os de quatre
orteils par des " orteils en acier ". En février
1996, le réclamant a dû subir une chirurgie de
remplacement de la hanche à l'hôpital de l'Université
de l'Alberta à Edmonton. Il a ressenti de la fatigue
et il est tombé malade à l'été
de 1999 ou 2000 et par la suite, il a subi de nombreux tests
qui ont malheureusement confirmé la présence
du VHC. Il a téléphoné à l'hôpital
Foothills et a été informé qu'il n'avait
reçu aucun produit sanguin à cet endroit. Il
a téléphoné à l'hôpital
Hanna et on l'a informé que l'hôpital détruisait
ses dossiers médicaux après 10 ans et que le
sien n'était plus disponible. Il est présentement
en rémission.
C. Analyse
[17] Voici les constatations des faits pertinents dans la
présente cause :
(a) Le réclamant est infecté par le virus de
l'hépatite C.
(b) La source probable d'une telle infection n'a pas été
établie comme preuve.
(c) Le réclamant a en effet reçu une unité
du 100 ml d'albumine à 25 % à l'hôpital
d'Hanna le 15 octobre 1988.
(d) Même s'il a reçu une transfusion de concentrés
de globules rouges à Hanna le 15 octobre 1988, l'enquête
de retraçage du donneur a révélé
que ce dernier s'était avéré VHC négatif,
selon le test de détection des anticorps, en utilisant
le test le plus avancé disponible, à savoir
celui du dosage enzyme immunologique général
3.0.
(e) Le réclamant n'a pas reçu de produits sanguins
alors qu'il avait été subséquemment hospitalisé
durant six semaines à l'hôpital Foothills de
Calgary.
(f) En conséquence, alors que le réclamant a
établi qu'il avait reçu une transfusion de produits
sanguins durant la période visée par les recours
collectifs, il a été incapable d'établir
que le donneur de tels produits était infecté
par le virus.
[18] Bien que l'avis de renvoi du réclamant portait
sur la question de l'albumine, lors de l'audience, ce dernier
a continué à exprimer des préoccupations
au sujet de la procédure d'enquête touchant le
concentré de globules rouges. Il faut donc traiter
des deux questions.
[19] Il est hors de tout doute que la compétence d'un
juge-arbitre d'accorder une indemnisation à un réclamant
est limitée par la définition du terme "
sang " selon l'article 1.01 du Régime. Nonobstant
le point de vue du Dr Changela à l'effet que le VHC
peut être transmis au moyen d'injections d'albumine
par voies intraveineuses, l'albumine à 25 % est spécifiquement
exclue de la définition du terme "sang ".
Le libellé du Régime est tout à fait
clair que les auteurs n'avaient pas l'intention d'inclure
l'albumine à 25 % dans la gamme des produits potentiellement
indemnisables.
[20] Cette limite de compétence d'un arbitre ou d'un
juge - arbitre en vertu du Régime est réitérée
dans les cas suivants qui ont tous résulté en
un refus inévitable de tout droit à des bénéfices
en vertu du Régime lorsque les produits reçus
par le réclamant étaient spécifiquement
exclus de la définition du terme " sang "
dans le libellé du Régime :
Décision d'arbitre no 23 en date du 23 novembre
2001 (Vincent R.K. Orchard, arbitre) concernant l'administration
de streptokinase, une enzyme utilisée pour dissoudre
les caillots sanguins en suspension chimique dans l'albumine.
Décision de juge-arbitre no 3 non confirmée
en date du 1er juin 2001 (Reva Devins, juge-arbitre), concernant
la réception de gammaglobulines RH, un autre produit
exclu de la définition du terme " sang "
dans le libellé du Régime.
Décision du juge-arbitre no 6 non confirmée
en date du 11 juin 2001 (Shelly L. Miller, c.r.), concernant
la réception de gammaglobuline IV (également
connue sous le nom de gammaglobuline intraveineuse), un autre
produit spécifiquement exclus de la définition
du terme " sang ".
[21] En fin de compte, la demande de renvoi du réclamant
doit être rejetée dans la mesure où il
a appuyé sa réclamation sur la réception
d'albumine.
[22] En ce qui concerne les préoccupations du réclamant
relativement à l'enquête de retraçage
des donneurs, certaines pourraient avoir été
traitées à sa satisfaction selon le témoignage
de Mme Miller. De toute façon, le réclamant
semble s'être appuyé davantage sur la question
de l'albumine. L'Administrateur s'en est tenu au Protocole
approuvé par le tribunal qui contient les critères
portant sur la procédure d'enquête pour les personnes
directement infectées. En procédant ainsi, il
a dû appliquer les dispositions du libellé du
Régime qui stipule :
3.04 Procédure d'enquête
(1) Malgré toute autre disposition du présent
régime, si les résultats d'une procédure
d'enquête démontrent que
aucun des donneurs
ou des unités de sang reçues par une personne
directement infectée ou une personne directement infectée
au
cours de la période visée par les recours collectifs
n'est ou n'était pas anti-VHC positif, sous
réserve des dispositions du paragraphe 3.04(2), l'Administrateur
doit rejeter la réclamation
(2) Le réclamant peut prouver que la personne directement
infectée
a été infectée
pour la première fois par le VHC par suite d'une transfusion
de sang reçue au Canada au cours de la période
visée par les recours collectifs
en dépit
des résultats de la procédure d'enquête.
Il est précisé pour plus de certitude que les
frais d'obtention de la preuve visant à réfuter
les résultats d'une procédure d'enquête
sont à la charge du réclamant, sauf décision
contraire d'un juge-arbitre, d'un arbitre ou d'un tribunal.
[C'est nous qui soulignons]
[23] Le conseiller du Fonds a candidement reconnu qu'il n'y
avait pas à ce jour de cas d'arbitre / de juge-arbitre
ou des tribunaux ayant permis à un réclamant
de " prouver qu'il avait été infecté
par le VHC, suite à une transfusion sanguine reçue
au Canada au cours de la période visée par les
recours collectifs, nonobstant les résultats de la
procédure d'enquête ". Du point de vue d'un
juge-arbitre, on peut se demander avec préoccupation
comment un réclamant peut réussir à faire
inverser le fardeau de la preuve imposée par l'article
3.04(2) du libellé du Régime, étant donné
qu'il n'a pas accès aux dossiers privés du donneur.
Cette question demeure non résolue une autre fois,
car, étant donné que le réclamant a surtout
appuyé sa cause sur la question de l'albumine à
25 %, il n'a tout simplement pas présenté de
preuves dans le cas présent qui permettraient à
un juge - arbitre de conclure que le réclamant avait
" réfuté les résultats de la procédure
d'enquête ". Cela doit être doublement frustrant
pour le réclamant, car non seulement a-t-il établi
qu'il avait reçu de l'albumine à 25 % au cours
de la période visée par les recours collectifs,
mais il a en fait été en mesure d'établir
l'exigence seuil à l'effet qu'une transfusion sanguine
avait été reçue au cours de la période
visée par les recours collectifs. Cependant, malheureusement
pour le réclamant, il n'a pas été en
mesure d'établir que les concentrés de globules
rouges ainsi reçus étaient infectés par
le VHC. Par conséquent, alors que nous serions fortement
tenté de vouloir aider le réclamant, si la preuve
nous le permettait dans le cas présent, il n'y avait
tout simplement pas assez de preuve qui nous permettrait de
modifier la conclusion de ce processus. Dans la mesure où
le réclamant appuie toujours son renvoi sur la transfusion
de concentrés de globules rouges, celui-ci doit être
rejeté.
[24] Le réclamant n'a pas le droit à une indemnisation.
L'Administrateur a l'obligation d'examiner chaque réclamation
et de décider s'il existe ou non une preuve en vue
d'une indemnisation. L'Administrateur n'a pas la discrétion
d'accorder une indemnisation lorsque la preuve requise n'existe
pas. La suffisance financière du Fonds dépend
d'un examen minutieux de chaque réclamation par l'Administrateur
qui doit décider si le réclamant est admissible.
De la même manière, un juge-arbitre n'a pas la
compétence de modifier, d'élargir ou d'ignorer
les modalités de la Convention de règlement
ou du Régime ou d'en élargir ou d'en modifier
la couverture, que ce soit relativement à la définition
du terme " sang " au sujet de la question de l'albumine
à 25 % ou de l'inversion du fardeau de la preuve selon
l'article 3.04(2) du libellé du Régime.
D. Décision
[25] Après avoir soigneusement examiné la Convention
de règlement, le Régime, les ordonnances des
tribunaux et les preuves orales et documentaires, je maintiens
par la présente le refus de la demande du réclamant
par l'Administrateur.
Fait à Saskatoon en Saskatchewan, ce 5e jour de septembre
2002.
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DANIEL SHAPIRO, c.r.
Juge-arbitre
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