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Hépatite C - Règlement des recours collectifs
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Renvois : Décisions homologuées par le juge arbitre : #110 - Le 4 septembre 2003

Décision du tribunal compétent en matière de recours collectifs - le 19 mai 2006

D É C I S I O N

A. Introduction

[1] Le réclamant a présenté une demande d'indemnisation à titre de personne directement infectée en vertu du Régime à l'intention des transfusés infectés par le VHC (" le Régime ").

[2] Cependant, par lettre en date du 18 novembre 2002, l'Administrateur a rejeté la réclamation après avoir examiné soigneusement la documentation fournie à l'appui de celle-ci, avec un comité de trois (3) évaluateurs principaux, pour les raisons suivantes :

Les résultats de votre procédure d'enquête ont confirmé que les donneurs du sang qui vous a été transfusé au cours de la période visée par les recours collectifs se sont avérés négatifs suite au test de détection des anticorps du VHC. À la lumière de cette information, votre réclamation a été rejetée. Vous avez indiqué dans votre réponse à notre première lettre que vous nous feriez parvenir d'autres preuves. Dans votre cas, tel qu'indiqué précédemment, aucune autre preuve n'a été reçue. Par conséquent, selon le paragraphe 3.04 du Régime à l'intention des transfusés infectés par le VHC de la Convention de règlement relative à l'hépatite C (1986-1990), votre réclamation est rejetée.

[3] Au moyen d'une demande de renvoi (" avis d'appel ") datée du 22 novembre 2002, le réclamant a demandé qu'un arbitre ou un juge arbitre soit saisi du refus de sa réclamation par l'Administrateur.

[4] Au paragraphe 4 de sa demande de renvoi, le réclamant a indiqué qu'il souhaitait faire examiner la décision de l'Administrateur pour les raisons suivantes :

Après l'avis d'approbation, les donneurs sont opportunément apparus après deux ans, soit le jour où on devait me faire parvenir un chèque. Je trouve que l'apparition soudaine de ces donneurs était trop opportune.


[5] Le réclamant a indiqué qu'il souhaitait qu'un juge arbitre soit saisi de son cas et a demandé la tenue d'une audience en personne. La date de l'audience a d'abord été prévue pour le 11 avril 2003. Le 11 avril 2003, le réclamant a fait savoir qu'il ne pouvait pas se présenter ce jour-là. L'audience a donc été reportée au 21 mai 2003.

[6] Les observations écrites de la Conseillère du Fonds, datées du 9 avril 2003, établissaient la position de l'Administrateur. L'Administrateur est d'accord que le réclamant a été hospitalisé au St. Paul's Hospital à Saskatoon le 2 décembre 1999 afin de subir une septorhinoplastie. Six unités de sang ont subi le test de compatibilité croisée et ont été transfusées. Les observations se poursuivent comme suit :

6. Le Régime définit la procédure d'enquête comme étant une " procédure de recherche et d'enquête ciblée des donneurs et/ou des unités de sang reçues par une personne infectée par le VHC ".
 
7. La Société canadienne du sang (" SCS ") a effectué la procédure d'enquête et a transmis un rapport à l'Administrateur le 14 décembre 2000. À cette date, la SCS avait terminé la procédure d'enquête en rapport avec trois des unités de sang et le résultat de chaque unité s'était avéré négatif. (Dossier de réclamation, pages 49 et 50)
 
8. Le 6 avril 2001, la SCS a fourni un autre rapport à l'Administrateur sur l'état de la procédure d'enquête. À cette étape, on a jugé la procédure d'enquête non concluante, étant donné que la SCS n'était pas en mesure de terminer le retraçage des six unités. (Dossier de réclamation, pages 53 et 54). Cependant, la SCS a reçu ultérieurement des renseignements complets et a fait rapport à l'Administrateur le 22 mai 2001 sur toutes les unités de sang. Le donneur de chaque unité de sang s'est avéré négatif suite au test de détection des anticorps du VHC . Par conséquent, le sang n'était pas la source de l'infection (du réclamant). (Dossier de réclamation, pages 59 et 60)
 
9. La SCS a expliqué la procédure d'enquête et les résultats dans une lettre datée du 5 décembre 2001. Deux des unités de sang avaient été soumises au test EIA (essai immunoenzymatique) de détection des anticorps du VHC, version 2. Les quatre autres unités de sang avaient été soumises au test EIA (essai immunoenzymatique) de détection des anticorps du VHC, version 3.0. Au moment de leur utilisation, les deux tests avaient été approuvés pour utilisation au Canada par Santé Canada. (Dossier de réclamation, pages 69-72)
 
10. Les tests de détection des anticorps du VHC selon l'essai immunoenzymatique sont extrêmement sensibles. Nous nous référons aux preuves de la SCS dans le renvoi no 1400889.

[7] Une audience en personne a eu lieu à Saskatoon le 21 mai 2003. Le réclamant a témoigné en son propre nom et Carol Miller, la Coordonnatrice des demandes de renvoi et d'arbitrage au Centre des réclamations relatives à l'hépatite C (1er janvier1986 au 1er juillet 1990 (le " Centre des réclamations ") a témoigné au nom de l'Administrateur. La cause sera donc jugée en fonction des arguments écrits et témoignages présentés par les parties, avec certains éléments d'information obtenus après l'audition et dont nous parlerons plus loin.

B. Faits et sommaire de la preuve

[8] En vertu des dispositions de la Convention de règlement relative à l'hépatite C du 1er janvier 1986 au 1er juillet 1990 (la " Convention de règlement ") et du Régime, la période visée par les recours collectifs est la seule période où une indemnisation peut être disponible. En outre, bien qu'il existe plusieurs sources possibles d'infection par rapport au virus de l'hépatite C ("VHC "), le Régime n'indemnise que les personnes ayant reçu des transfusions, au cours de la période visée par les recours collectifs, de produits sanguins définis pour lesquels les donneurs ont subi le test de détection des anticorps du VHC et se sont avérés VHC positifs.

[9] Dans le formulaire de renseignements généraux du réclamant (TRAN 1) daté du 30 juin 2000, le réclamant a déclaré qu'il croyait avoir été infecté par le VHC à la suite d'une transfusion sanguine reçue au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs. Il a affirmé avoir reçu une transfusion sanguine au Canada durant la période visée par les recours collectifs et aucune autre transfusion par la suite. Dans le formulaire de déclaration (TRAN 3) qui l'accompagnait et daté du 29 juin 2000 , le réclamant a ajouté qu'au meilleur de ses connaissances et croyances, il était " vrai " qu'il " n'était pas été infecté par le virus de l'hépatite non-A non-B ou de l'hépatite C avant le 1er janvier 1986 ". Dans la case 4 du TRAN 3, le réclamant a coché la case " vrai " à côté de la déclaration à l'effet qu'il " n'a jamais utilisé de drogues intraveineuses sans ordonnance ". Le médecin du réclamant, le Dr T, a rempli le formulaire du médecin traitant (" TRAN 2 ") le 13 juin 2000. Dans la section F, il a coché " oui " à la case 2 après l'énoncé : " D'après la définition de sang, le réclamant a-t-il reçu une transfusion sanguine durant la période entre le 1er janvier 1986 et le 1er juillet 1990 ". Le médecin a ajouté que cette information était " en 1989, selon les dossiers - je n'ai pas ces dossiers ". Le médecin a coché " non " en réponse à la question : " Y a-t-il une indication quelconque dans les antécédents médicaux de la personne infectée par le VHC à l'effet qu'elle a été infectée par l'hépatite non-A, non-B ou le VHC avant le 1er janvier 1986? " Dans la section F, à la case 1 demandant si le réclamant avait des antécédents de facteurs de risque reliés au VHC sauf dans le cas des transfusions de sang durant la période visée par les recours collectifs, le médecin a indiqué " aucun ". Ce formulaire indiquait également que le médecin connaissait le réclamant depuis 21 mois.

[10] La tournure inattendue dans ce dossier remonte au rapport de cinq mois de la SCS au Centre en date du 6 avril 2001 . Il comprend les résultats de l'enquête de retraçage relative aux donneurs des unités de sang transfusées au réclamant, et indique que les donneurs de trois des six unités de sang transfusées se sont avérés négatifs. Toutefois, il n'y a aucun résultat sur les trois autres unités. Dans un des cas, il y a une note indiquant : " lettre reçue, aucun résultat présenté ". Dans les deux derniers cas, la note dit tout simplement : " lettre envoyée - aucune réponse ". Dans la deuxième lettre d'envoi du 6 avril 2001 au Centre, la SCS dit : " Cette enquête de retraçage est jugée non concluante ". Dans le cas de résultats non concluants lorsqu'on établit qu'il y a eu une transfusion de sang durant la période visée par les recours collectifs, on accorde le bénéfice du doute au réclamant. Étant donné la situation, en avril 2001, le Centre a fait parvenir une lettre au réclamant, y compris une quittance entière et définitive que ce dernier a remplie le 1er mai 2001 et a retournée au Centre le 2 mai 2001. La réclamation a été approuvée au niveau 3 de la maladie tout comme un paiement forfaitaire de 57 283,21 $. Alors que le Centre s'apprêtait à réquisitionner la demande de chèque à transmettre au réclamant le 12 mai 2001, la SCS a fourni d'autres renseignements sur l'enquête de retraçage comprenant des renseignements supplémentaires du programme de retraçage régulier de la SCS. À cette date, on indiquait que chacune des trois unités pour lesquelles aucune information n'avait été disponible auparavant avait maintenant été retracée et que les donneurs étaient négatifs. À la lumière de cette nouvelle information, comme le chèque n'avait pas encore été transmis au réclamant, le Centre a écrit à ce dernier l'avisant qu'on annulait l'approbation préalable de la réclamation qui s'appuyait sur des résultats d'une enquête de retraçage non concluante et qu'il était maintenant devenu nécessaire de refuser la réclamation. Le réclamant a été invité à présenter d'autres preuves réfutant les résultats finaux de l'enquête de retraçage. Le réclamant n'a fourni aucune autre preuve supplémentaire au Centre en vue de réfuter les résultats.

[11] Dans la lettre du 12 mai 2001 de la SCS au Centre, on avait préparé un tableau comprenant le numéro de chacune des six unités ainsi que la date de transfusion et indiquant que l'établissement où les tests de sang avaient eu lieu était celui de la SCCR, le Sask. Health ou le Saskatoon District Health, après quoi la lettre contenait l'énoncé suivant :

…Les numéros des unités mentionnées plus haut ont été entrés dans le système de données sur le sang de la SCS (" base de données BLIS "), un système informatisé qui retrace les données sur les donneurs de sang. Le système BLIS permet à la SCS de retracer les donneurs à partir des numéros des unités. Les donneurs associés à chacun des numéros d'unités indiqués plus haut ont été retracés. On a conclu que trois des donneurs associés aux produits mentionnés plus haut avaient été testés lors de dons de sang ultérieurs. Les trois autres donneurs ont été avisés et ont soumis des résultats de test. ...

Lorsqu'on a effectué des tests sur les donneurs associés aux unités A 722934-2 et A 722791-8, la Société canadienne de la Croix-Rouge (" SCCR " ) était responsable du système de sang au Canada.

Le test de dépistage que la SCS utilise présentement en vue de détecter la présence des anticorps de l'hépatite C est l'essai immunoenzymatique de détection des anticorps du VHC, version 3.0 (test EIA 3.0) qu'on a commencé à utiliser en ou vers juin 1996. Avant cette date, la SCCR utilisait le test EIA 2.0. Au moment de leur utilisation, Santé Canada avait approuvé l'utilisation de chacun d'eux au Canada. Pour les besoins du programme de retraçage, la SCS utilise les tests EIA 2.0 et EIA 3.0 pour détecter le VHC.

Pour les besoins de son programme d'enquêtes de retraçage, la SCS utilise les résultats du test des anticorps du VHC effectué par des laboratoires de test en dehors de la SCS, notamment la Saskatchewan Health et le Saskatoon District Health. Saskatchewan Health nous a informé qu'en 2001, au moment de vérifier les donneurs associés aux unités A 726736-6 et A 726709-9, son laboratoire utilisait le test Abbott AxSYM HCV 3 version 1.00.1 immuno-assay.

Le Saskatoon District Health a indiqué qu'en 1999, au moment de tester le donneur associé à l'unité A 726693-4, il utilisait le test IMX HCV 3.0 immuno-assay.


[12] Madame Horkins a déposé une mise à jour des renseignements médicaux sur l'hépatite C de la Fondation canadienne du foie qui fournit des détails sur les sources possibles d'infection par le VHC, ainsi que l'énoncé suivant : " Selon les données des É.-U., dans 10 % des cas d'hépatite C, on ne peut retracer la source de l'infection ". Elle a également fourni un article intitulé " Enhanced surveillance of acute hepatitis B and C in four health regions in Canada, 1998 to 1999 ", Shimian Zou et al, Can J Infect Dis Vol 12 No 6 November/December 2001 où, en page 361, on précise que la source inconnue d'infection s'établit à 20,8 %.

[13] Au début de l'audience en personne, madame Horkins a également remis une copie des motifs du jugement de monsieur le juge Pitfield de la Colombie-Britannique publié le 9 mai 2003, dans la cause de la réclamation numéro 1300593, qui traite des dispositions sur : " l'inversion de la charge de la preuve " ou sur les dispositions du " nonobstant " du paragraphe 3.04 de la Convention de règlement. Pour être juste, madame Horkins a invité le juge arbitre et le réclamant à prendre le temps d'examiner cette décision avant de présenter des preuves, car elle estimait que ce cas indiquait que le réclamant devait présenter une preuve très convaincante pour se prévaloir de cette clause. À son avis, le cas requiert que le réclamant apporte une preuve médicale pour à peu près chacun de ses antécédents médicaux, et que le Régime n'avait pas le fardeau de chercher une telle preuve.

[14] Comme témoignage de vive voix, madame Miller a témoigné sur le processus utilisé pour vérifier le dossier du réclamant, y compris l'obligation de ce dernier d'établir : (a) une preuve qu'il avait reçu des produits de sang durant la période visée par les recours collectifs (ce que le réclamant a pu faire ici) et (b) une enquête de retraçage donnant un résultat positif (ce que le réclamant n'a pas réussi à faire ici). Elle a en outre présenté un témoignage sur le protocole relatif à la procédure d'enquête tel qu'approuvé par les tribunaux. Parfois, un réclamant obtient ses propres dossiers de santé avec les numéros des unités inscrits ou on peut demander à la SCS de produire les dossiers de la banque de sang. On ne peut effectuer les enquêtes de retraçage que lorsque le réclamant s'est avéré positif. La SCS peut entrer dans le système et accéder aux renseignements sur les donneurs - p. ex., sont-ils VHC positifs ou non? Si, d'une manière ou d'une autre, il n'y a aucun dossier, la SCS retrace le donneur et fixe une date de test. Ici, chacun des donneurs s'est avéré VHC négatif. Même si on a effectué les tests aussi loin dans le temps qu'en 1993 et aussi tôt qu'en 2001, le donneur aurait toujours été porteur du VHC, s'il avait déjà été positif. Si le donneur ne portait pas l'anticorps au moment du test, c'est qu'il n'avait donc jamais porté le virus auparavant. Madame Miller a fait référence à une lettre du médecin du réclamant, le Dr T., datée du 28 mai 1998 qui précisait :

Ce monsieur a reçu six unités de globules concentrées à la suite de saignements dus à une chirurgie subie en décembre 1989. Il ne présente aucun autre risque connu relié à l'hépatite C, et à la demande récente de la Croix-Rouge, il a été testé et trouvé anti-VHC positif. Si vous désirez obtenir une documentation plus détaillée à ce sujet, n'hésitez pas à communiquer avec moi.


[15] Selon les résultats positifs du test ACP et de la biopsie du foie, ajoutés aux renseignements fournis jusqu'à cette date par le réclamant et son médecin, compte tenu des constatations non concluantes de trois des six unités de sang transfusé, on a jugé qu'il y avait suffisamment de preuves pour obtenir une indemnisation au niveau 3 et on a approuvé la réclamation sur cette base. Madame Miller a témoigné que les donneurs ne sont pas testés pour le virus (qui peut être éliminé ou peut apparaître, puis disparaître), mais plutôt pour l'anticorps du VHC qui demeure avec vous pour la vie. En réponse aux questions du réclamant, madame Miller a signalé que le test pour le virus vous donne une image de ce qui se passe un jour donné chez le donneur, alors que le test pour l'anticorps révèle l'état passé du donneur. Elle a en outre témoigné à l'effet que la SCS suivait des règles strictes pour les enquêtes de retraçage et le test fiable GEN 2 ou 3 approuvé par Santé Canada. Tous les tests effectués après 1996 le sont au moyen du GEN 3. En outre, madame Miller a témoigné que si un des donneurs n'avait pas répondu ou n'avait pas été testé, étant donné la présomption en faveur du réclamant lorsqu'on a établi que la transfusion a été effectuée durant la période visée par les recours collectifs, le test aurait été jugé non concluant et on aurait versé l'indemnisation au réclamant. Le Programme d'avis de litige (PAL) est complété à l'intérieur de six mois. C'est Santé Canada et non pas le Centre qui a effectué l'enquête de retraçage en mai 2001 et qui a fourni de nouveaux renseignements au sujet des trois unités en rapport avec lesquelles aucune réponse n'avait été fournie précédemment. Lorsque le Centre a reçu les renseignements à l'effet que les six donneurs s'étaient en fait tous avérés négatifs, il a dû rejeter la réclamation. En réponse à d'autres questions du réclamant, madame Miller a témoigné que même les procédures de test de 1993 sont considérées fiables et il n'y a aucun fondement raisonnable permettant de suggérer que les donneurs testés en 1992 et en 1994 devraient être testés de nouveau en utilisant le test GEN 3. En réponse aux questions du juge arbitre, madame Miller a témoigné que la chirurgie en question a causé beaucoup de saignement, car une transfusion de six unités de sang est un volume important.

[16] Le réclamant a ensuite présenté son témoignage. Il est né en Ontario et a grandi sur une ferme dans la vallée de l'Outaouais. Il buvait autrefois mais ne boit plus. Il a quitté l'école à l'âge de 16 ans et est devenu ouvrier de la construction. Il est déménagé en Saskatchewan il y a 25 ans, alors qu'il avait 23 ans. Il est présentement employé comme conducteur de niveleuse pour la R.M. où il réside. Il ne s'adonne plus à l'agriculture. Il a travaillé pendant un certain nombre d'années comme surintendant d'une piste de course de chevaux. Il a aussi travaillé comme mineur dans le nord de la Saskatchewan. Quant à ses antécédents médicaux, il se rappelle avoir subi une appendicectomie à l'âge de neuf ans, en Ontario. Il a connu une " adolescence normale ", il a travaillé fort et s'est beaucoup amusé. Il n'a pas subi de tatouages, de perçages du corps ou utilisé de drogues intraveineuses. À l'âge de 17 ou 18 ans, il a été impliqué dans un accident qui a requis de 10 à 12 points de suture à l'arrière de la tête. Il s'est cassé le bras à quelques reprises, mais rien qui ait exigé des séjours prolongés à l'hôpital. Ses seuls congés de travail ont été pour des blessures au dos. Il est marié avec deux enfants, l'un âgé de 20 ans et l'autre, de 17 ans, chacun étant en bonne santé, sauf que l'un d'eux souffre de troubles d'ossature. Sa femme a été testée et est exempte du VHC. Il a eu d'autres partenaires sexuels avant d'épouser sa femme il y a 20 ans, mais aucune autre partenaire qu'elle depuis. Il ne connaît personne dans son cercle d'amis, dans sa famille ou chez des personnes avec qui il a eu des contacts qui soit atteint du VHC. Il n'avait jamais entendu parler du VHC jusqu'à ce qu'il reçoive sa lettre lui demandant d'aller subir le test en 1999. Son état de santé est bon à l'heure actuelle. Il a été inoculé régulièrement et a fait référence à la clinique médicale de Saskatoon où il est allé. Il a décrit l'incident malheureux de décembre 1989 qui a exigé une chirurgie nécessitant la transfusion des six unités de sang. Il avait été battu sévèrement lors d'une réception et avait subi un coup au nez. Depuis cette chirurgie, son dossier médical a consisté en une blessure au pied et des blessures mineures comme des entorses aux chevilles ou aux pieds. Il a également subi un coup à la tête en 1996 ou 1997 alors qu'il était au travail et il a perdu 17 dents qui ont requis des points de suture, mais il n'a manqué que quelques heures de travail à cette occasion. Il s'est également fait extraire deux dents de sagesse, il y a quatre ou cinq ans. Il croit que son omnipraticien avant le Dr T. a transmis tous ses dossiers au Dr T. Son infectiologue n'a pas exprimé d'avis à savoir comment il croyait que le réclamant avait contracté le VHC, mais il a indiqué qu'il y avait d'autres façons de contracter le VHC que par des transfusions de sang. Questionné par madame Horkins, le réclamant a reconnu qu'il avait été brièvement incarcéré une fois ou deux, seulement pour la nuit, pour infractions au code de conduite reliées à l'alcool.

[17] A la fin de l'audition, il y a eu une discussion sur les antécédents médicaux du réclamant. Étant donné la nature de la chirurgie qui s'est produite durant la période visée par les recours collectifs et les multiples unités de sang transfusées au réclamant, pour ne laisser aucune question en suspens dans l'examen de la demande d'indemnisation du réclamant, le juge arbitre a estimé qu'il fallait prendre des mesures pour obtenir au moins le dossier médical complet du réclamant en possession du Dr T. qui comprendrait présumément également les dossiers du médecin que le réclamant avait consulté auparavant. Selon ce que ces dossiers révéleraient, l'une et l'autre des parties pourrait trouver utile d'examiner ou de demander d'autres dossiers. Madame Horkins a en outre indiqué qu'elle pourrait vouloir présenter d'autres observations en ce qui a trait à la fiabilité des tests GEN 2 et GEN 3.

[18] Le 29 mai 2003, le juge arbitre a écrit la lettre suivante au Dr T. :

Je désire vous informer que je suis le juge arbitre nommé pour déterminer si (le réclamant) a droit à certaines indemnisations.

Dans le but de m'aider à prendre une décision en la matière, j'apprécierais recevoir des copies de votre fiche et dossier médical au sujet du (réclamant), y compris la correspondance envoyée et reçue, y compris toute fiche médicale qui vous a été transmise par l'ancien médecin du (réclamant). Je ne vous demande pas de rapport médical/légal à ce moment.

J'inclus le consentement du (réclamant) vous permettant de me divulguer ces renseignements. En outre, je m'engage à défrayer vos coûts raisonnables de photocopies et de postes.

Je vous remercie de votre aide en la matière.


[19] Le Dr T. a transmis sa fiche le 9 juin 2003, dont copies ont également été transmises à la même date au réclamant et à madame Horkins, avec la demande que les récipiendaires avisent le juge arbitre avant le 26 juin 2003 s'ils avaient l'intention de demander ou de fournir d'autres renseignements médicaux. Cette fiche a été reçue à titre de preuve comme Pièce 2, étant donné qu'elle a été déposée lors de l'audience. Ayant examiné cette fiche, il semble que le réclamant s'était mépris dans sa compréhension, à savoir que la fiche de son ancien médecin avait été transmise à son médecin actuel, le Dr T. La fiche décrit certaines des blessures à la cheville et autres décrites par le réclamant. Elle fait référence également à des objets étrangers qui avaient été enlevés de l'œil du réclamant en 1996 ou 1997, et qui avaient laissé une cicatrice cornéenne (corneal scaring). Il y a un rapport d'un infectiologue de Saskatoon en date de 1998 confirmant que l'épouse du réclamant avait été déclarée négative selon le test de détection des anticorps du VHC. Malheureusement, la fiche ne contient aucun dossier sur le réclamant avant le début de ses consultations auprès du Dr T. Le réclamant n'a déposé aucun document supplémentaire, comme par exemple, des dossiers de santé antérieurs, et il n'a également pas demandé du temps pour le faire ou de l'aide du juge arbitre.

[20] Sous couverture d'une lettre datée du 13 juin 2003, la Conseillère juridique du Fonds a fourni une copie d'une lettre datée du 30 mai 2003 de Lindsay Patterson, Gestionnaire du Programme de médecine transfusionnelle de la SCS à Carol Miller, Cordonnatrice des demandes de renvoi et d'arbitrage du Centre des réclamations relatives à l'hépatite C (1986-1990). La lettre de la SCS a été reçue à titre de preuve comme Pièce 3, étant donné qu'elle a été déposée lors de l'audience et comprend ce qui suit :

Vous avez demandé que la SCS vous fournisse des renseignements supplémentaires sur les donneurs reliés aux unités transfusées au réclamant ci-haut mentionné.

En s'acquittant de son obligation de fournir des renseignements sur l'enquête de retraçage à l'Administrateur du Fonds, la SCS ne compromettra pas les droits de confidentialité de ses donneurs en matière de renseignements personnels. La SCS a l'obligation de protéger la confidentialité de ses donneurs et a enchâssé ces principes dans sa politique d'accès à l'information et de protection de la vie privée.

Les donneurs de la SCS s'attendent que la SCS maintienne la confidentialité de leurs renseignements personnels. La suffisance de l'approvisionnement en sang serait menacée si la SCS violait les droits des donneurs à la confidentialité, car ces bénévoles cesseraient probablement de donner du sang .

Par ailleurs, la SCS reconnaît que le résultat de l'enquête de retraçage de la SCS dans le présent cas a été un facteur considéré par l'Administrateur du Fonds pour prendre sa décision et que comme tel, l'enquête est sous examen dans le renvoi.

Santé Canada requiert que la SCS, et la Société canadienne de la Croix-Rouge ("SCCR") avant elle, interdise de façon permanente à tout donneur ayant subi un test de contrôle positif relié à l'anticorps de l'hépatite C (" anti-VHC ) de donner du sang dans l'avenir, peu importe si ce donneur s'avère positif ou négatif lors du test de confirmation. Comme vous le savez, la SCCR avait mis en œuvre la première génération des tests anti-VHC (EIS 1.0) à compter de juillet 1990 et la deuxième génération de test anti-VHC (EIZ 2) à compter de juin 1992.

Voici une liste qui indique le nombre de dons effectués par les donneurs spécifiques associés aux numéros des unités en question.

Numéro d'unité Nombre de dons  
722934 22 *Test du VHC - EIA 2.0
726693 2  
722889 30  
726709 1  
722791 24 *Test du VHC - EIA 2.0
726736 1  
Chacun de ces dons subséquents a été testé en fonction de divers marqueurs de maladies transmissibles, y compris l'anti-VHC. Aucun de ces tests de contrôle anti-VHC subséquents n'a été positif. Le résultat des tests les plus récents que la SCS a en dossier sur ces donneurs a été fourni dans les derniers rapports mis à jour de la SCS sur l'enquête de retraçage


[21] Le 12 août 2003, le juge arbitre a reçu une lettre de madame Horkins datée du 5 août 2003 qui comprenait un rapport de Dr Steven Kleinman daté du 5 août 2003. Celui-ci a été fourni dans le but d'aider le réclamant dans sa compréhension de la fiabilité du test des donneurs, peu importe qu'on utilise le test EIA 2 ou 3. Madame Horkins a exprimé le point de vue que l'Administrateur rendait le rapport du Dr Kleinman disponible, nonobstant le fait que ce dernier n'avait aucune obligation de prouver la fiabilité de ces tests qui font partie de la procédure d'enquête approuvée par les tribunaux. Le rapport du Dr Kleinman a été reçu à titre de preuve comme Pièce 4, comme s'il avait été déposé lors de l'audience. Plutôt que de paraphraser le rapport du Dr Kleinman, il est joint intégralement à la présente décision. Le juge arbitre a écrit aux deux parties le 14 août 2003, invitant le réclamant à présenter tout document ou toute observation supplémentaire qu'il pouvait obtenir avant le 28 août et a informé les parties que la décision serait prise en fonction des documents en main à cette date. Le réclamant n'a présenté aucune autre observation.

C. Analyse

[22] Voici les constatations substantielles des faits dans la présente cause :

(a) Le réclamant est infecté par l'hépatite C.

(b) La source probable d'une telle infection n'a pas été établie lors de la preuve.

(c) Bien que le réclamant ait reçu une transfusion de six unités de globules rouges concentrées au St. Paul's Hospital, à Saskatoon, en décembre 1989, la procédure de retraçage a démontré que dans chaque cas, le donneur s'était avéré négatif suite au test de détection des anticorps du VHC, en utilisant les tests les plus avancés disponibles au moment pertinent, notamment les tests de détection du VHC, l'EIA 2.0 et l'EIA 3.0 respectivement.

(d) Le réclamant n'a reçu aucun autre produit de sang lors du séjour à l'hôpital avant ou après la chirurgie de décembre 1989.

(e) En conséquence, bien que le réclamant ait établi qu'il avait reçu une transfusion de produits de sang à Saskatoon durant la période visée par les recours collectifs, il n'a pas été en mesure d'établir qu'aucun des donneurs de tels produits était infecté par le virus.

[23] Il n'y a aucune preuve indiquant que l'Administrateur n'a pas suivi le protocole approuvé par les tribunaux comprenant les critères des procédures d'enquête pour les personnes directement infectées. Après avoir suivi le protocole, il se devait d'appliquer les dispositions du texte du Régime qui stipule ce qui suit :

3.04 Procédure d'enquête
 
(1) Malgré toute autre disposition du présent régime, si les résultats d'une procédure d'enquête démontrent …qu'aucun des donneurs ou des unités de sang reçues par une personne directement infectée ou une personne directement infectée…au cours de la période visée par les recours collectifs n'est ou n'était anti-VHC positif, sous réserve des dispositions du paragraphe 3.04(2), l'administrateur doit rejeter la réclamation…
 
(2) Le réclamant peut prouver que la personne directement infectée … été infectée pour la première fois par le VHC par suite d'une transfusion de sang reçue au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs… en dépit des résultats de la procédure d'enquête. Il est précisé pour plus de certitude que les frais d'obtention de la preuve visant à réfuter les résultats d'une procédure d'enquête sont à la charge du réclamant, sauf décision contraire d'un juge arbitre, d'un arbitre ou d'un tribunal.[C'est nous qui soulignons]

[24] À cet égard, le juge arbitre est conscient d'autres décisions pouvant avoir une influence sur cette question, y compris les suivantes :

Décision confirmée du juge arbitre no 29 - Le 6 février 2002, John P. Sanderson, c.r., juge arbitre, tel que maintenue le 14 juin 2002 par la décision d'un tribunal ayant compétence dans les recours collectifs (Monsieur le juge Pitfield).
 
Décision de l'arbitre no 54 - Le 15 août 2002, Vincent R.K. Orchard, arbitre
 
Décision confirmée du juge arbitre no 79 - Le 14 janvier 2003, Daniel Shapiro, c.r.
 
Décision de l'arbitre no 66 - Le 1er novembre 2002, Daniel Shapiro, c.r.

[25] La Conseillère du Fonds a candidement reconnu que jusqu'à présent, il n'y avait eu aucun cas d'arbitre ou de juge arbitre ou des tribunaux permettant au réclamant de " prouver qu'il avait été infecté par le VHC par suite d'une transfusion de sang reçue au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs, nonobstant les résultats de la procédure d'enquête ".

[26] Il est nécessaire d'examiner soigneusement la décision de monsieur le juge Pitfield dans la Convention de règlement relative à l'hépatite C Réclamation no 1300593, 2003 CSCB 739. Les paragraphes suivants portent sur les questions examinées dans le présent dossier :

[13] Le protocole d'enquête a été élaboré en s'appuyant sur les recherches scientifiques à jour. La Convention de règlement et le protocole ont été approuvés par des conseillers juridiques au nom des membres des recours collectifs et des défendeurs et par la suite, par ordonnance des tribunaux. On a établi que le protocole était le meilleur moyen de relier l'infection à une transfusion de sang pour laquelle la Convention de règlement prévoit une indemnisation.
 
[14] Alors que la raison principale pour établir l'admissibilité est la procédure d'enquête, un réclamant peut présenter des preuves lors d'un renvoi à l'appui de la réclamation qu'il a été infecté pour la première fois durant la période visée par les recours collectifs, malgré un résultat d'enquête négatif. À mon avis, le paragraphe 3.04(2) ne permet pas à un réclamant d'effectuer sa propre procédure d'enquête. Le paragraphe prévoit qu'il peut y avoir des preuves qui établiraient que la source de l'infection, plus probablement que non ou selon la prépondérance des probabilités, était une transfusion reçue durant la période visée par les recours collectifs. Ce n'est pas la réponse pour un réclamant qui tente de fournir de telles preuves à l'effet qu'un certain pourcentage infime de la population peut être infecté par des sources de VHC inconnues. Si une telle affirmation était la réponse, un réclamant ne pourrait jamais réfuter les résultats des enquêtes de retraçage, parce qu'il ne pourrait jamais prouver qu'il ne faisait pas partie de ce petit pourcentage de la population ayant pu être ainsi infecté.
 
[15] La preuve que le réclamant aurait à présenter lors d'un renvoi comprendrait au moins les dossiers médicaux personnels et familiaux complets et des preuves détaillées sur tous les aspects de son mode de vie, y compris des preuves d'absence de possibilités d'être infecté par des seringues ou des injections, peu importe la manière et le but de sa réception. Les genres de preuves que j'ai décrits ne visent pas à être exhaustifs. Ils visent plutôt à indiquer le processus à suivre lorsqu'on tente de réfuter le résultat de l'enquête de retraçage.
 
[16] La simple négation par un réclamant de son passé ou de ses activités personnelles présentées comme sources possibles de non- transfusion d'une infection par le VHC ne suffirait pas. Il faudrait que la fiabilité de l'affirmation subjective de nature soit vérifiée par un renvoi à toutes les preuves objectives connues. Une des pièces comme preuve objective comprend les résultats de l'enquête de retraçage qui s'appuie sur l'application du protocole d'enquête approuvé et / ou conforme à celui-ci. Il faudrait que des preuves objectives contradictoires soient très persuasives si le résultat de l'enquête devait être réfuté.
 
[17] Dans le cas présent, le réclamant n'a fourni aucune preuve de quelque sorte à l'Administrateur, au juge arbitre ou en présentant cette requête, qui permettrait de réfuter les résultats négatifs de l'enquête de retraçage. [C'est nous qui soulignons]

[27] Lors de son argumentation, madame Horkins a été invitée à nous dire quelles circonstances pourraient, de son point de vue, respecter l'approche de la " preuve matérielle concluante " établie par monsieur le juge Pitfield. Elle a donné comme exemple la situation où un réclamant en excellente santé selon ses antécédents médicaux pleinement documentés a reçu un seul don de sang où des signes d'infections comme une jaunisse ou une fonction hépatique élevée tel que détectée par des tests seraient apparus peu de temps après la transfusion. Il a été reconnu que certaines personnes (pas toutes) démontrent des signes de VHC aigus. En outre, le réclamant aurait à fournir un dossier médical complet indiquant l'absence de possibilité d'infection provenant d'autres sources.

[28] Dans le cas présent, le juge arbitre a initié un processus consécutif à l'audience en vue d'obtenir des renseignements médicaux supplémentaires, afin d'avoir tout mis en oeuvre pour s'assurer qu'il avait examiné toutes les possibilités permettant au réclamant de bénéficier de ses droits à l'indemnisation. On s'est dit préoccupé lors de l'audience quant à la fiabilité du test GEN 2 et quant au nombre des unités de sang transfusé reçu, chacune augmentant théoriquement le risque de transmission du VHC. Toutefois, malheureusement pour le réclamant, les renseignements contenus dans le dossier du Dr T. n'a pas du tout pu aider le réclamant à défendre sa position, puisqu'il n'y avait aucune preuve des nombreux hôpitaux et médecins que le réclamant avait visités plus tôt dans sa vie. Il y a eu preuve d'une appendicectomie antérieure et d'autres possibilités d'infection, bien qu'aucune source définitive d'infection n'ait été établie comme preuve. La lettre du 30 mai 2003 de la SCS qui résume les nombreux dons de la part de quatre des six donneurs, et en particulier, les 22 et 24 dons respectivement de chacun des donneurs testés au moyen du GEN 2 dissiperont, nous l'espérons, quelques-unes des préoccupations du réclamant. Néanmoins, ils donnent plus de poids à la fiabilité et à la validité de l'application de la procédure d'enquête dans ce cas particulier.

[29] En conclusion, il n'y a tout simplement eu aucune preuve médicale contradictoire convaincante ou autre présentée par le réclamant pouvant répondre aux exigences du test Pitfield, afin de permettre à un juge arbitre de conclure que le réclamant avait " réfuté les résultats de la procédure d'enquête ".

[30] Ce résultat doit être particulièrement frustrant et perturbateur pour le réclamant, car non seulement a-t-il établi qu'il a reçu des produits de sang au cours de la période visée par les recours collectifs lors d'un séjour au St. Paul's Hospital à Saskatoon en décembre 1989, mais effectivement, il a pu établir également que les produits de sang lui ont été transfusés et enfin, qu'il avait appris que sa réclamation avait été approuvée. N'eût-il été pour la preuve fournie par la SCS, à la 11e heure, il aurait reçu son paiement initial et sa réclamation aurait été approuvée. Toutefois, malheureusement pour le réclamant, selon l'analyse finale, il n'a pu établir que les cellules concentrées reçues au St Paul's Hospital étaient infectées par le VHC. Le nombre d'unités de sang transfusé, accompagné du fait qu'il y avait six donneurs distincts, n'ont servi qu'à augmenter à juste titre la croyance du réclamant qu'il y avait eu erreur dans les tests des donneurs. En effet, l'allégation du réclamant à l'effet que les chances d'erreur aient augmenté avec chaque donneur additionnel a un certain mérite au départ. Étant donné le nombre de donneurs distincts impliqués dans le présent dossier, si le test avait été le GEN 1, les arguments du réclamant auraient eu plus d'autorité. Toutefois, étant donné le poids combiné des arguments non contredits du Dr Kleinman quant à la fiabilité des tests GEN 2 et GEN 3, de la lettre de la SCS du 30 mai 2003, des nombreux tests de plusieurs des donneurs et du cadre de la procédure d'enquête approuvée par le tribunal, la position du réclamant ne peut prévaloir.

[31] La preuve du réclamant a été fournie de la façon la plus candide et la plus directe. Il n'y a pas lieu de douter de la sincérité de sa croyance qu'il avait contracté le VHC suite aux transfusions reçues au St. Paul's Hospital. Néanmoins, il n'y a pas de preuve adéquate permettant de répondre au test énoncé par monsieur le juge Pitfield, de manière à permettre d'infirmer les conclusions de ce processus. Le juge arbitre est satisfait que le Centre ne cherchait pas des façons de rejeter la réclamation du réclamant, mais au contraire, a coopéré pleinement afin de s'assurer d'explorer pleinement toutes les possibilités d'indemnisation disponibles au réclamant en vertu du Régime. Bien que la façon dont les événements se sont déroulés ait été tout naturellement troublante pour le réclamant, le fait que le chèque a été réquisitionné démontre en outre la bonne foi du Centre dans l'administration de cette réclamation.

[32] L'appel doit être rejeté. Le réclamant n'a pas droit à une indemnisation. L'Administrateur a l'obligation d'évaluer chaque réclamation et de déterminer s'il existe ou non la preuve d'indemnisation requise. L'Administrateur n'a pas la discrétion d'accorder une indemnisation lorsque la preuve requise n'existe pas. La suffisance du Fonds dépend de l'examen pertinent par l'Administrateur de chaque réclamation et de sa décision du droit ou non du réclamant à l'indemnisation. Dans le même ordre d'idées, le juge arbitre n'a pas l'autorité requise de modifier, d'élargir ou d'ignorer les dispositions de la Convention de règlement ou du Régime ou d'en étendre ou d'en modifier la couverture, y compris l'inversion de la charge de la preuve contenue au paragraphe 3.04(2) du texte du Régime.

D. Décision

[33] Après avoir soigneusement examiné la Convention de règlement, le Régime, les ordonnances du tribunal et le témoignage de vive voix ainsi que la preuve documentaire rendue, le refus de l'Administrateur de la demande d'indemnisation du réclamant est par la présente maintenu.

Fait à Saskatoon, Saskatchewan, ce 4e jour de septembre 2003.


________________________________
DANIEL SHAPIRO, c.r., arbitre certifié
Juge arbitre



Rapport du Dr Steven Kleinman à la Conseillère juridique du Fonds
Test de détection des anticorps du VHC subi par les donneurs de sang
Le 5 août 2003

Mes titres et qualités pour rendre une opinion sur l'administration du test des anticorps du VHC aux donneurs de sang sont les suivants :

· Formation spécialisée dans le domaine de la médecine transfusionnelle (entreposage du sang), y compris un certificat décerné par l'American Board of Pathology pour cette discipline.

· Responsabilités de travail préalable comme Directeur médical de l'American Red Cross Blood Services de la région du Sud de la Californie et Codirecteur de la médecine transfusionnelle au UCLA Medical Centre.

· Compétences spéciales dans le domaine des infections transmises par transfusions ainsi que démontrées par sept années d'expérience comme Président de l'American Association of Blood Banks Transfusion Transmitted Disease Committee, par ma participation comme principal investigateur dans plusieurs études de recherche à grande échelle parrainées par le gouvernement des États-Unis sur les infections transmises par transfusions et par ma publication de nombreux articles scientifiques revus par mes pairs ainsi que des chapitres d'ouvrages portant sur les infections et maladies transmises par transfusions (y compris l'hépatite C).


Test de détection des anticorps du VHC

Le test de détection des anticorps de l'hépatite C (également connus sous leur forme abrégée de VHC) a été breveté à la fois aux fins de dépistage et de diagnostic du sang par Santé Canada. Plusieurs versions du test ont été brevetées, y compris la version 1 ou ELISA 1 (mise en place pour le retraçage des donneurs de sang au Canada (vers juillet 1990), la version 2 ou ELISA 2 (mise en place vers juillet 1992), et la version 3 ou ELISA 3 (mise en place vers juin 1996).

La première version du test des anticorps de l'hépatite C (désignée ELISA 1) utilisait une seule protéine recombinante de l'hépatite C. La deuxième version du test des anticorps (ELISA 2) utilisait plusieurs protéines supplémentaires de l'hépatite C dans le système de test, permettant ainsi de détecter des anticorps dirigés contre plusieurs produits de gènes viraux plutôt que contre seulement un antigène viral. La troisième version du test de l'anticorps (ELISA 3) utilise un antigène supplémentaire et a reformulé certains antigènes utilisés dans ELISA 2.

Les données sur le rendement d'ELISA 2 comparé à ELISA 1 indiquent une réactivité beaucoup plus élevée en utilisant ELISA 2. Plusieurs sources différentes de données indiquent que le test ELISA 1 ne détectait que de 60 à 80 % des infections dues à l'hépatite C par rapport à celles détectées par ELISA 2. [1,2]

Contrairement à ELISA 1, il y a de nombreux rapports qui documentent la réactivité élevée des essais ELISA 2 et ELISA 3 pour détecter l'infection due à l'hépatite C. [2-7]. Certains articles font état de tests de réactivité de 100 % [2,3] alors que d'autres indiquent que la réactivité de l'essai ELISA 3 est légèrement plus élevée que celle d'ELISA 2. [4]

Il a été extrêmement difficile de déterminer précisément la réactivité des essais ELISA 2 et ELISA 3, car leur rendement est tellement similaire et parce qu'il n'y a pas d'exemple idéal pour diagnostiquer l'infection due au VHC. Les différentes études indiquent des réactivités légèrement différentes pour ces essais; la réactivité indiquée dans les rapports de recherche pour chacune de ces versions d'ELISA varie en fonction de la population utilisée pour évaluer les tests. Par conséquent, la plupart des rapports de synthèse ne fournissent pas de comparaisons directes entre la réactivité des essais ELISA 2 ou ELISA 3, mais précisent plutôt que leurs réactivités sont relativement équivalentes. En outre, les insertions de la FDA sur les produits pour les deux essais ne font pas mention de réactivité des tests, probablement en raison de l'absence d'une méthode exacte pour la mesurer.

Le consensus de base de ces rapports est qu'il y a seulement de très petites différences de rendement entre ELISA 3 et ELISA 2. Les données sur le rendement d'ELISA 3 comparées à ELISA 2 indiquent une légère hausse de réactivité dans certains scénarios de tests spécifiques. Il y a une hausse de réactivité au début de l'infection due à l'hépatite C (détection précoce de conversion sérologique chez certains patients), une détection améliorée des anticorps chez les malades immunosuppressifs, une spécificité améliorée (moins de faux résultats positifs), et une réactivité légèrement meilleure à détecter l'anticorps dans les infections chroniques. En conclusion, les publications de recherche disponibles appuient le fait que les spécialistes du domaine s'accordent à dire que les essais ELISA 2 et ELISA 3 ont une réactivité élevée pour diagnostiquer l'infection due à l'hépatite C.

Deux études récentes ont porté sur certains aspects spécifiques du rendement d'ELISA 2 et ELISA 3 chez des populations des donneurs de sang. [8, 9] La première étude est pertinente à la transmission du VHC par transfusion de sang, c.-à-d. la fréquence selon laquelle l'essai ELISA 3 détecte un donneur qui s'avère négatif selon l'essai ELISA 2 et dont le sang contient le virus de l'hépatite C (et est donc potentiellement contagieux). L'étude porte sur 5,5 millions de dons vérifiés dans 13 centres de banques de sang des États-Unis après la mise en place du test de dépistage de routine des donneurs en 1999 au moyen du HCV RNA. [8] Les investigateurs ont déterminé que ce phénomène se produit à un taux d'environ 1 sur 200 000 dons. L'interprétation de ces données est qu'avant la mise en place du HCV RNA en 1999, il y aurait eu un cas sur 200 000 transfusions où le test du VHC selon l'essai ELISA 2 n'aurait pas détecté l'infection du VHC alors que le test du VHC selon l'essai ELISA 3 l'aurait détectée. Ces données indiquent qu'il s'est produit une légère hausse au niveau de la sécurité du sang avec la mise en place du test ELISA 3. Cependant, ces données ne sont pas directement pertinentes à la question de l'utilisation de l'essai ELISA 2 plutôt que l'essai ELISA 3 dans les enquêtes de retraçage.

La deuxième étude porte sur la question de la capacité des deux essais de détecter les infections passées dues au VHC chez les donneurs de sang. Dans cette étude, 501 dons (sur un total approximatif de 292 000 dons testés avec ELISA-3) qui avaient été confirmés anti-VHC positifs selon l'essai ELISA 3, lorsque ce test a été utilisé pour la première fois dans le système de retraçage des donneurs de sang, ont été testés de nouveau en utilisant l'essai ELISA 2. [9] Les auteurs ont découvert que 15 de ces 501 dons (2,99 %) étaient négatifs avec ELISA 2; ELISA 2 avait détecté >97 % des dons positifs selon ELISA 3. En d'autres mots, dans le cas où l'anticorps du VHC avait été démontré par l'essai ELISA 3 chez un donneur, l'anticorps n'avait pas été détecté par l'essai ELISA 2 dans seulement 3 % des cas. Cette étude différait de la première étude décrite ci-dessus en ce sens que tous les 15 résultats positifs selon l'essai ELISA 3/et négatifs selon l'essai ELISA 2 se retrouvaient parmi les donneurs négatifs du test HCV RNA qui seraient très peu susceptibles de transmettre le VHC.

Il faut être très prudent dans la façon de faire une extrapolation des données de la dernière étude décrite ci-dessus dans le cas du scénario de l'enquête de retraçage, étant donné que celle-ci représente une circonstance différente de la question examinée dans cette étude. L'énoncé à l'effet que si l'essai ELISA 3 est positif, l'essai ELISA 2 sera négatif dans 3 % des cas (qui est la conclusion de l'étude sur les donneurs de sang décrite ci-dessus) ne signifie pas la même chose que l'énoncé à savoir que si l'essai ELISA 2 est négatif, alors l'essai ELISA 3 sera positif dans 3 % des cas. Ce dernier énoncé est la situation qu'on nous demande d'évaluer dans les cas d'enquête de retraçage donnant des résultats négatifs selon l'essai ELISA 2. Selon moi, il serait beaucoup plus probable qu'un test ELISA 2 négatif dans une enquête de retraçage représente une absence de l'anticorps du VHC par opposition à l'anticorps détectable seulement par ELISA 3. Par conséquent, je crois que la différence de 3 % dans le retraçage indiquée dans l'étude des donneurs de sang représente la probabilité maximale de cette occurrence dans le scénario de l'enquête de retraçage. Cependant, il se peut très bien que la probabilité soit beaucoup moins que 3 % qu'un résultat négatif de retraçage avec ELISA 2 donne un résultat positif avec ELISA 3.

Un résumé récent du rendement actuel des tests de l'anticorps du VHC utilisés par un spécialiste reconnu des tests du VHC a été présenté lors d'une conférence du US National Institutes of Health Consensus Conference: Management of Hepatitis C: 2002. Au sujet des tests EIA pour détecter le VHC (EIA et ELISA sont deux abréviations différentes pour le même test), le conférencier a écrit " l'anti-VHC est typiquement détecté en utilisant les essais immunoenzymatiques de deuxième ou de troisième génération qui détectent des mélanges d'anticorps de divers épitopes du VHC. La spécificité actuelle des tests EIA disponibles pour l'anticorps du VHC est plus élevée que 99 %. Leur réactivité est plus difficile à déterminer en l'absence d'un exemple idéal plus sensible. Les tests anti-VHC EIA détectent les anticorps chez plus de 99 pour cent des patients immunosuppressifs détectables selon le HCV RNA. " [5] En d'autres mots, l'infection due au VHC peut être diagnostiquée en utilisant les tests ELISA avec succès dans 99 cas sur 100. C'est un rendement extrêmement élevé pour un essai de laboratoire.


Références

1. Alter HJ. New kit on the block: evaluation of second-generation assays for detection of antibody to the hepatitis C virus. Hepatology 1992: 15:350-353

2. Bresters D, Cuypers HTM, Reesink HW et al. Enhanced sensitivity of a second generation ELISA for antibody to Hepatitis C virus. Vox Sang 1992; 62:213-217

3. Vrielink H, Zaaijer HL, Reesink HW et al. Sensitivity and specificity of three third-generation anti-hepatitis C virus ELISAs. Vox Sang 1995; 69:14-17

4. Gretch DR. Diagnostic tests for hepatitis C. Hepatology 1997; 26 (Suppl.1): 43S -
47S

5. Pawlotsky JM. Use and interpretation of virologic tests. NIH Consensus Conference: Management of Hepatitis C: 2002 abstract program book available on the Web at http://consensus.nih.gov/cons/116/1l6cdc_ intro.htm

6. Courouce AM, Barin F, Botte C et al. A comparative evaluation of the sensitivity of seven anti-hepatitis C virus screening tests. Vox Sang 1995; 69:213-216

7. Germer JL, Zein NN. Advances in the molecular diagnosis of Hepatitis C and their clinical implications. Mayo Clinic Proc 2001; 76:911-920

8. Galel SA, Strong DM, Tegtmeier GE et al. Comparative yield of HCV RNA testing in blood donors screened by 2.0 versus 3.0 antibody assays. Transfusion
2002; 42:1507-13

9. Impact of HCV 3.0 EIA relative to HCV 2.0 EIA on blood donor screening. Tobler LH, Stramer SL, Lee SR et al. Transfusion 2003 (in press)


Dr. Steven Kleinman
Professeur de pathologie clinique
Université de la Colombie Britannique
Vancouver, C.- B.

D É C I S I O N  du tribunal compétent en matière de recours collectifs - le 19 mai 2006


 

Déni de responsabilité