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Hépatite C - Règlement des recours collectifs
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Renvois : Décisions de l'arbitre : #157 - Le 23 août 2004

D É C I S I O N

Réclamation no 665

Province d’infection – Nouvelle-Écosse

1. La réclamante a présenté une demande d’indemnisation conformément au paragraphe 3.05 du Régime à l’intention des transfusés infectés par le VHC en tant que représentante personnelle d’une personne directement infectée (la mère de la réclamante) qui est décédée avant le 1er janvier 1999.

2. Par lettre en date du 26 juillet 2001, l’Administrateur a refusé la réclamation parce que la réclamante n’avait pas fourni de preuve suffisante permettant d’établir que le décès de la personne directement infectée avait été causé par son infection par le VHC.

3. La réclamante a demandé qu’un arbitre soit saisi du refus de la réclamation par l’Administrateur.

4. Des audiences ont eu lieu le 25 février, le 27 juin et le 21 août 2002 et les observations par écrit ont été présentées par le Conseiller du Fonds le 9 janvier 2002 et le 3 août 2004.

5. Les faits non contestés peuvent se résumer comme suit :

(i) La personne directement infectée a subi un triple pontage en décembre 1987. Elle avait 77 ans au moment de la chirurgie et avait subi un infarctus du myocarde en 1985 suivi d’une angine de poitrine instable. Elle souffrait également depuis longtemps du diabète type 2.

(ii) La personne directement infectée a reçu des produits de sang lors d’une chirurgie de pontage ou immédiatement après. Environ un mois plus tard, elle a contracté une jaunisse et ses niveaux de transaminase sont devenus très élevés. On a alors diagnostiqué qu’elle souffrait d’une infection aiguë d’hépatite virale non A-non B suite à une transfusion de sang contaminé.

(iii) La phase aiguë de l’infection s’est résorbée et en juin 1988, des tests de laboratoire démontraient des niveaux normaux de bilirubine et de SGPT (ALT). Les tests subséquents de transaminase et de bilirubine en 1989, 1996 et 1997 ont tous été en deçà des limites normales. Un rapport d’examen physique en 1989 indiquait que le foie était non manifeste et qu’on avait détecté aucune autre anomalie. Une échographie en 1990 décrivait l’apparence du foie comme étant normale.

(iv) En 1996, les tests de détection des anticorps du VHC et de confirmation RIBA se sont avérés positifs. On n’a effectué aucun test ACP ou de biopsies en rapport avec l’hépatite C.

(v) Les quelques dernières années de vie de la personne directement infectée ont été caractérisées par la fatigue, l’anorexie et la perte de poids. Ces symptômes ont été examinés à plusieurs occasions sans qu’il y ait eu de diagnostic défini.

(vi) Même si la personne directement infectée a reçu des soins médicaux réguliers, elle n’a jamais subi de traitement pour l’hépatite C.

(vii) La personne directement infectée est décédée à l’hôpital le/vers le 19 février 1998.

(viii) Le médecin de famille depuis de nombreuses années de la personne directement infectée a rempli le formulaire TRAN 2. Il a indiqué sur le formulaire TRAN 2 que son infection par le VHC n’avait pas contribué de façon importante à son décès. Dans une note rédigée à la main, le médecin a indiqué :

« Cette note a pour but d’attester que j’étais le médecin traitant de la patiente susmentionnée qui est décédée le 19 février 1998. Elle était une patiente asymtomatique de l'hépatite C qui est décédée d’une défaillance cardiaque ».

6. Contre la toile de fond des faits non contestés précédents, il y a une différence d’opinion médicale quant à savoir si oui ou non le décès de la personne directement infectée a été causé par son infection par le VHC. Dans ce contexte, les témoins médicaux et l’Administrateur ont poursuivi le processus en prenant pour acquis que si l’infection par le VHC contribue de façon importante au décès de la personne, on peut dire alors de façon appropriée que le décès a été causé par l’infection. Je propose de faire de même.

7. Le Dr Ian Rendak a aidé la réclamante tout au long du processus d’arbitrage. Il est médecin spécialiste en radiologie diagnostique mais n’a pas de formation ou d’expérience spéciale en rapport avec l’hépatite C. Il n’a jamais rencontré la personne directement infectée et, par conséquent, son avis se fonde strictement sur un examen du dossier médical qu’il a obtenu de son médecin de famille. On peut résumer ainsi l’avis du Dr Rendak :

« ...En parcourant le dossier, notamment les consultations du Dr Cookey et du Dr Dill, il faut conclure qu’elle a contracté une hépatite aiguë environ cinq semaines après avoir reçu une transfusion de sang entier en décembre 1987. Elle a ensuite démontré des signes d’hépatite chronique en dedans d’une année, signes qui ont persisté jusqu’à son décès. Pendant ces années, elle a principalement souffert de fatigue profonde, de symptômes de grippe et d’anorexie.

Sa santé générale s’est lentement dégradée et au moment de son décès, son poids est tombé à cent (100) livres (de 180 livres) en raison de son dépérissement chronique. Elle souffrait de cardiopathie mais le Dr Dill, spécialiste du cœur, a mentionné à maintes reprises qu’il ne pensait pas que sa fatigue était due à son état cardiaque. En outre, son diabète type 2 était relativement léger et n’exigeait pas d’insuline et était apparemment sous contrôle. On a jugé que la maladie thyroïdienne n’était pas la cause de sa fatigue. Au cours de ses derniers jours à l’hôpital, on n’a trouvé aucune note indiquant qu’on la traitait pour une défaillance cardiaque aiguë ou même subaiguë. En rétrospective, il est très raisonnable de conclure qu’elle est décédée d’une lente détérioration évolutive de sa santé accompagnée d’une hépatite chronique comme important facteur sous-jacent ».

8. Contre-interrogé par le Conseiller juridique du Fonds, le Dr Rendak a admis qu'il était extrêmement difficile de dire dans quelle mesure l'infection par le VHC avait contribué au décès de la personne directement infectée.

9. Le Dr K. Peltekian est un spécialiste des maladies et des transplantations du foie qui pratique à Halifax. Il est reconnu comme spécialiste en diagnostic et en gestion de l'hépatite C. Tout comme le Dr Rendak, le Dr Peltekian n'a jamais traité la personne directement infectée et son opinion est donc fondée uniquement sur l'examen du dossier médical de la patiente. Son avis est contenu dans un rapport écrit en date du 8 janvier 2004. Dans le rapport, le Dr Peltekian examine les antécédents de la première infection et les symptômes subséquents de la personne directement infectée. Il note que l'hépatite C est une maladie évolutive lente, mais déclare que le processus évolue plus rapidement chez les personnes qui ont une « charge virale élevée » et sont avancées en âge au moment de l'infection. Le rapport se termine sur ce qui suit:

« Sans doute que les derniers événements étaient indépendants de la maladie du foie. Les patients dans le même groupe d'âge avec tous les autres problèmes sans l'hépatite C sont à risque de mourir. Mais, à mon avis, l'hépatite C chez cette patiente a évolué vers un niveau plus avancé que ce qui a été suggéré. Dans ce contexte, l'hépatite C a contribué au décès mais n’a évidemment pas été sa seule cause. »

10. Le Dr Curtis Cooper est spécialiste en médecine interne et en maladies infectieuses. Au cours des sept dernières années, il a travaillé à la clinique d'hépatite virale au campus de l'Hôpital général d'Ottawa qui suit environ 1 000 patients souffrant d'infections d'hépatite virale chroniques. Le Dr Cooper dirige également un programme actif et productif de recherche en hépatite virale à Ottawa. Le Dr Cooper a examiné le dossier médical de la personne directement infectée. Il a également examiné les opinions du Dr Rendak et du Dr Peltekian. Le Conseiller juridique du Fonds a déposé deux rapports du Dr Cooper - un premier rapport en date du 17 avril 2002 et un rapport supplémentaire en date du 10 mai 2004.

11. Dans son rapport du 17 avril 2002, le Dr Cooper décrit les circonstances de l’infection initiale et les antécédents médicaux subséquents. Il discute également des résultats de plusieurs examens reliés au foie qui ont été entrepris au cours des derniers dix ans de vie de la personne directement infectée.

12. Le Dr Cooper indique dans son rapport que la personne directement infectée était atteinte d’insuffisance rénale que peut causer l’infection par l’hépatite C. Cependant, il était d’avis que la cause la plus probable dans le cas présent était le diabète et la maladie vasculaire sous-jacente. Le Dr Cooper note également que la fatigue, l’anorexie et la perte de poids peuvent être des symptômes d’infection chronique par l’hépatite C. Encore une fois cependant, il était d’avis que les causes les plus probables de ces symptômes dans le cas présent étaient la cardiopathie ischémique, la défaillance cardiaque, l’insuffisance rénale chronique et les médicaments (les agents beta-bloquants sont bien connus comme étant des causes de fatigue et d’anorexie).

13. Le rapport du 17 avril 2002 du Dr Cooper se termine avec la déclaration suivante :

« Même si cette patiente souffrait d’une infection chronique d’hépatite C, je ne crois pas que cette infection ait contribué à [son] effondrement clinique ou à son décès. »

14. Dans son rapport du 10 mai 2004, le Dr Cooper n’est pas d’accord avec le Dr Peltekian qu’il y a corrélation entre le niveau de la charge virale du VHC et le taux de fibrose du foie. En outre, même s’il convient avec le Dr Peltekian que la fibrose progresse généralement plus rapidement chez les patients plus âgés infectés par le VHC, il poursuit en disant que ce processus prend tout de même des décennies avant que ne paraisse la cirrhose hépatique. Comme dans son rapport précédent, le Dr Cooper souligne l’absence de constatations cliniques et réitère son avis antérieur que la fatigue, l’anorexie et la perte de poids de la personne directement infectée au cours des dernières années de sa vie n’étaient probablement pas attribuables au VHC chronique. La conclusion du rapport est comme suit :

« En terminant, je suis d’avis que cette patiente a été exposée au VHC en décembre 1987. Nous ne saurons jamais si elle est demeurée [sic] chroniquement infectée Même si je prends pour acquis qu’elle est demeurée chroniquement infectée, il n’y a aucune preuve que cette infection se serait transformée en une maladie du foie en phase teminale. Si vous assumez qu’elle est demeurée chroniquement infectée, il y a possibilité qu’elle ait alors ressenti une fatigue chronique, mais il est beaucoup plus probable que d’autres troubles médicaux aient été la cause de tous les symptômes de cette patiente.»

15. Tel que facilement démontré par la preuve médicale, le cas présent est difficile. De l’avis du Dr Rendak et du Dr Peltekian, le décès de la personne directement infectée a été causé par son infection par le VHC ou cette dernière a contribué à son décès. Le Dr Cooper partage l’avis contraire, tout comme son médecin de famille. Le Dr Peltekian et le Dr Cooper sont tous deux des spécialistes reconnus dans le domaine de l’infection par le VHC.

16. La réclamante a le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que le décès de la personne directement infectée a été causé par l’infection par le VHC. On n’exige pas qu’une telle preuve soit absolue mais elle doit respecter le test civil de la « prépondérance des probabilités ».

17. Dans le cas présent, il ne peut y avoir de véritable doute que la personne directement infectée était infectée par le VHC suite à une transfusion de sang contaminé au cours de la période visée par les recours collectifs. La réclamante a également présenté des éléments de preuve de deux médecins à l’effet que la personne directement infectée était atteinte d’une infection chronique par le VHC qui a causé ou contribué de façon importante à son décès. De l’autre côté de l’équation, il y a le formulaire TRAN 2 rempli par le médecin de famille indiquant que la personne directement infectée est décédée d’une défaillance cardiaque et que son infection par le VHC n’était pas un facteur ayant contribué au décès. De façon plus importante, il y a l’avis du Dr Cooper que l’infection par le VHC n’a aucunement contribué de façon importante au décès.

18. En tenant compte de toute la preuve, j’ai conclu que la réclamante ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve à l’effet que le décès de la personne infectée par le VHC avait probablement été causé par son infection par le VHC. En arrivant à cette conclusion, je suis influencé par le fait que la personne directement infectée n’a jamais reçu de diagnostic indiquant qu’elle souffrait d’une infection chronique par le VHC ou qu’elle était traitée pour cette maladie du temps où elle était encore vivante. En outre, tel que souligné dans les rapports du Dr Cooper, les enquêtes reliées au foie effectuées en 1989, 1996 et 1997 ont donné des résultats en deçà des limites normales. Il est également clair que, d’après le dossier, la personne directement infectée souffrait depuis longtemps d’affectation vasculaire et de diabète type 2. Dans le même ordre d’idées, on ne semble pas contester le fait que la cause immédiate de son décès ait été la défaillance cardiaque. Tel qu’indiqué dans le rapport du Dr Peltekian, « Les derniers événements étaient sans doute indépendants de la maladie du foie. »

19. En tout respect pour le Dr Peltekian, il est difficile de comprendre comment on peut déclarer que l’infection par le VHC était un facteur de contribution importante dans le cas présent si les « événements finaux » étaient indépendants de la maladie du foie.

20. Comme conclusion, même si on ne peut éviter de sympathiser avec la réclamante pour sa perte, la cause d’arbitrage doit être rejetée.

FAIT à Halifax, Nouvelle-Écosse, ce 23e jour du mois d’août 2004.

S. BRUCE OUTHOUSE, c.r.
Arbitre


 

Déni de responsabilité