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Hépatite C - Règlement des recours collectifs
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Renvois : Décisions homologuées par le juge arbitre : #182 - Le 30 mars 2005

D É C I S I O N

Contexte :

Demande de renvoi no 3838

Je suis saisi à titre de juge-arbitre de la réclamation d’un représentant personnel d’une personne infectée par le VHC, laquelle avait présenté une réclamation en tant que personne directement infectée en décembre 2000.

La réclamation originale de la réclamante s’est butée à un refus en décembre 2003, l’Administrateur du Fonds indiquant qu’il n’y avait pas de preuve que la réclamante avait reçu du sang durant la période visée par les recours collectifs, soit du 1 er janvier 1986 au 1 er juillet 1990.

Malheureusement, la réclamante est décédée le 7 juillet 2004, mais ses enfants et son beau-fils qui agissait à titre de représentant personnel de la personne infectée ont choisi de continuer cette demande de renvoi et se faire entendre devant moi.

L’audition, d’abord prévue pour le 1 er juin 2004, a dû être remise à cause de l’état de santé de la réclamante et a finalement procédé le 25 août 2004.

Le représentant de l’Administrateur du Fonds, présent lors de l’audition ainsi que les procureurs du Fonds ont accepté que la demande de renvoi procède devant moi même si tous les documents n’avaient pas encore été complétés pour confirmer qui était le représentant personnel de la personne infectée. Tous les membres de la famille ont reconnu devant moi que le gendre de la réclamante décédée était mandaté et autorisé à agir à titre de représentant et c’est sur cette base que nous avons donc procédé.

Trois filles de la réclamante originale, un fils et son gendre ont tour à tour témoigné avec beaucoup d'émotion et avec ce qui m'a paru être beaucoup de sincérité. Ils ont parlé d’une dame qui avait vécu une vie aimante et tranquille et dont la vie avait été bouleversée à cause de cette terrible maladie et qui était décédée à l'âge de 59 ans.

Révisant la preuve documentaire et testimoniale, je note que le formulaire de renseignements (TRAN1) complété par la réclamante indiquait qu’elle avait reçu une transfusion de sang entre le 1 er janvier 1986 et le 1 er juillet 1990. La réclamante a été hospitalisée à l'Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal en mars et avril 1989 et elle y a subi une hystérectomie abdominale totale et une salpingo-ovariectomie gauche. Cependant, on ne retrouve pas d'emblée au dossier de l'Hôpital du Sacré-Cœur, évidence que la patiente a effectivement reçu une transfusion durant son séjour à l'hôpital.

Le formulaire du médecin traitant aux fins de la présente réclamation, a été complété par le Dr Claude Bernier, gastro-entérologue. Ce médecin indiquait, à la section F de ce document, que la personne directement infectée n’avait pas reçu de transfusion sanguine au cours de la période du 1 er janvier 1986 au 1 er juillet 1990. À ce sujet d’ailleurs, le gendre de la personne directement infectée a témoigné à l’effet qu’il était présent lorsque le Dr Bernier a signé le TRAN2 et il confirme que le Dr Bernier avait le dossier complet de la réclamante à l’Hôpital du Sacré-Cœur, et qu’il « avait passé à travers » le dossier avant de compléter le formulaire.

J'ai aussi pris connaissance d'un document signé par la personne en charge de la sécurité transfusionnelle à l’Hôpital du Sacré-Cœur et qui indique qu’il n’y a aucune preuve de transfusion au dossier de la réclamante. Ce même renseignement est reproduit au rapport signé par le directeur des affaires médicales de Héma-Québec en septembre 2003.

Pourtant, deux filles de feu Madame la réclamante ont témoigné et disent être allées au centre hospitalier, en 1989, et se souvenir que leur mère recevait alors une transfusion de sang. Tous les témoins ont affirmé devant moi que leur mère ou belle-mère, selon le cas, disait de son vivant, et ce de façon répétée, qu’elle était certaine d’avoir reçu du sang lors de son hospitalisation à Sacré-Cœur.

Je me dois donc d'analyser cette preuve contradictoire à la lumière du texte de l'entente.

L’article 3.01 de la Convention de règlement relative à l’hépatite C 1986-1990 prévoit qu’une personne qui prétend être une personne directement infectée doit remettre à l’Administrateur un formulaire de demande accompagné des dossiers médicaux ou des dossiers de la Société Canadienne de la Croix-Rouge ou d’Héma-Québec démontrant qu’elle a effectivement reçu une transfusion de sang au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs.

L’article 3.01(2) prévoit par ailleurs que malgré les dispositions du paragraphe qui précède, un réclamant qui ne peut se conformer aux dispositions de tel paragraphe doit remettre à l’Administrateur une preuve corroborante établissant selon la prépondérance des probabilités qu’il a bel et bien reçu une transfusion de sang au Canada au cours de la période visée par les recours collectifs. L’article 3.01(2) ajoute toutefois que cette preuve corroborante doit être « indépendante des souvenirs personnels du réclamant ou de toute personne qui est membre de la famille du réclamant ».

Par ailleurs, l’article 3.05 parle de la réclamation par le représentant personnel d’une personne infectée par le VHC et qui est maintenant décédée, et fait référence directe à la preuve exigée par le paragraphe 3.01 mentionné ci-haut et ce sont donc les normes des articles 3.01(1)a) et 3.01(2) qui doivent s'appliquer ici.

Seuls des membres de la famille de la réclamante décédée ont témoigné devant moi à l'effet que Madame avait reçu une transfusion en 1989. Il n’y a aucune preuve à cet effet aux extraits du dossier de Sacré-Cœur qui m'étaient disponibles lors de l'audition, la déclaration signée par le médecin traitant (TRAN2) est à l’effet contraire et ce renseignement négatif se retrouve aussi au dossier de Héma-Québec. Je n'ai pas retrouvé au dossier de preuve corroborante indépendante des souvenirs des membres de la famille de la réclamante qui ont témoigné devant moi.

Dans le but de ne rien échapper, j’ai demandé au représentant personnel de la réclamante de signer une autorisation pour me permettre de consulter le dossier de Madame la réclamante, à Sacré-Cœur, relativement à son hospitalisation de 1989.

Après un long délai, j'ai effectivement reçu ce dossier d'environ 60 pages et je l'ai étudié attentivement. J'y retrouve une note comme quoi 1000 cc. de sang avaient été mis de côté en vue de la chirurgie, mais rien au dossier ne suggère que telle transfusion s'est avérée nécessaire et a effectivement été donnée. Les notes des divers intervenants du centre hospitalier me paraissent détaillées et complètes et n'indiquent pas que le sang mis de côté a été transfusé.

La présente demande d’indemnisation est présentée dans le cadre de la Convention de règlement relative à l’hépatite C pour la période visée par les recours collectifs de 1986‑1990, tel qu’approuvée par l’ordonnance de la Cour supérieure du Québec en septembre 1999.

Les dispositions du règlement expliquent en détails quelles sont les personnes admissibles à l’indemnisation et comment elles peuvent établir leur admissibilité.

À cet effet, je me permets de citer un passage de la décision de Monsieur le juge J. Winkler de l’Ontario, dans le cadre d’une requête d’opposition à la confirmation d'une décision rendue par un juge-arbitre en juin 2001 (décision 004).

« La juge-arbitre a rejeté l’appel de la réclamante en s’appuyant sur le fait que cette dernière n’avait pas fourni la preuve d’une transfusion sanguine au cours de la période des recours collectifs tel que requis en vertu de la Convention de règlement. Le témoignage de la réclamante était à l’effet qu’elle avait reçu une transfusion sanguine au cours de la période des recours collectifs lors d’un séjour à l’hôpital en 1989. Cependant, la réclamante n’avait pas de preuve indépendante pour vérifier sa réclamation tel que requis en vertu de la Convention. De plus, tel que constaté par la juge-arbitre, les dossiers de l’hôpital et médicaux de la réclamante n’ont pas corroboré sa preuve mais ont eu plutôt l’effet contraire, indiquant expressément qu’elle n’avait pas reçu de transfusion sanguine durant son séjour à l’hôpital en 1989. En vertu de la Convention de règlement, le souvenir d’un membre des recours collectifs ou d’une personne reliée au membre des recours collectifs n’est pas une preuve suffisante pour établir le droit à l’indemnisation. Par conséquent, la juge-arbitre a constaté qu’elle n’était pas en mesure de conclure que la réclamante avait reçu une transfusion sanguine au cours de la période visée par les recours collectifs. Comme cette condition constitue une exigence essentielle pour être membre des recours collectifs et avoir droit à une indemnisation, la juge-arbitre a maintenu la décision de l’Administrateur et rejeté l’appel de la réclamante. »

(les soulignés sont de nous)

Ayant pris note que la réclamante avait témoigné à l’effet qu’elle avait bel et bien reçu une transfusion sanguine en 1989 mais que le dossier de l’hôpital de la réclamante n’avait pas corroboré ses allégués, et surtout ayant noté que la réclamante n’avait pas de preuve indépendante pour vérifier sa réclamation tel que requis par la convention, Monsieur le juge Winkler a confirmé la décision de la juge-arbitre qui avait rejeté l’appel de la réclamante.

Je suis fort conscient que la réclamante dans notre cas a eu, dans les dernières 10 années de sa vie, une vie difficile qui nécessairement et malheureusement a eu des répercussions sur tous les membres de sa famille. Tous les témoins que j’ai entendus m’ont paru sincères et leur désir de respecter la mémoire de leur mère ou de leur belle-mère transpirait de chacun de leur témoignage et ne peut que leur faire honneur. Malheureusement, tout comme Monsieur le juge Winkler dans l’affaire mentionnée ci-haut, je me dois de conclure qu’il n’y a pas de preuve à l’effet que feu la réclamante a reçu une transfusion entre le 1er janvier 1986 et le 1er juillet 1990. Puisque c'est là une exigence essentielle pour être membre du recours collectif et avoir droit à une indemnisation, je juge que le présent recours est mal fondé.

La décision de l’Administrateur doit donc être maintenue.

Montréal, le 30 mars 2005

Jacques Nols
Juge-arbitre

JN/mb

 

 

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