Renvois : Décisions
de l'arbitre : #125 - Le 27 février 2004
D É C I S I O N
Réclamation no 1000492
Province d'infection - Nouvelle-Écosse
1. La réclamante a présenté une demande
d'indemnisation à titre de personne directement infectée
en vertu du Régime à l'intention des transfusés
infectés par le VHC.
2. Par lettre datée du 23 novembre 2001, l'Administrateur
a refusé la réclamation parce que l'enquête
de retraçage avait confirmé qu'aucun donneur
du sang transfusé à la réclamante au
cours de la période visée par les recours collectifs
s'étaient avérés positifs suite au test
de détection des anticorps du VHC.
3. La réclamante a demandé qu'un arbitre soit
saisi de la décision de refus de sa réclamation
par l'Administrateur.
4. On a demandé aux deux parties d'indiquer si elles
souhaitaient obtenir une audience orale mais ni l'une ni l'autre
n'a indiqué en désirer une.
5. Deux affidavits ont été présentés
par le Conseiller juridique de la réclamante. Le premier
affidavit a été fait sous serment par la réclamante
en date du 4 février 2003. Le deuxième affidavit
a été fait sous serment par le conjoint de la
réclamante en date du 5 février 2003.
6. Le Conseiller du Fonds a présenté des observations
en date du 1er octobre 2003. Le Conseiller juridique de la
réclamante a refusé l'occasion de présenter
des observations par écrit.
7. Les faits pertinents peuvent se résumer comme suit
:
(i) L'infection par le VHC de la réclamante a été
diagnostiquée en 1997.
(ii) La réclamante a reçu des transfusions de
sang au Hants Community Hospital à Windsor, en Nouvelle-Écosse,
le 27 février 1990 et le 28 février 1990.
(iii) Conformément à la procédure standard
d'opération, la Société canadienne du
sang a effectué une enquête de retraçage
du sang reçu par la réclamante à deux
occasions. On a réussi à retracer les donneurs
et ils ne sont pas avérés positifs suite au
test de détection des anticorps du VHC.
(iv) La réclamante croit qu'elle a également
reçu une transfusion de sang au Hants Community Hospital
lors de son admission pour donner naissance à son premier
enfant en mars 1988. Cependant, elle n'a pu présenter
de dossier démontrant qu'elle avait reçu une
transfusion de sang à cette occasion. Au contraire,
les dossiers de l'hôpital portant sur son admission
en mars 1988 indiquent spécifiquement qu'elle n'avait
pas reçu de transfusion.
8. Le paragraphe 3.01 du Régime à l'intention
des transfusés infectés par le VHC se lit comme
suit :
" 3.01 Réclamation par une personne directement
infectée
|
(1) Quiconque prétend être une personne
directement infectée doit remettre à l'administrateur
un formulaire de demande établi par l'administrateur
accompagné des documents suivants :
|
(a) des dossiers médicaux, cliniques, de laboratoire,
d'hôpital, de la Société canadienne
de la Croix-Rouge, de la Société canadienne
du sang ou d'Héma-Québec démontrant
que le réclamant a reçu une transfusion
de sang au Canada au cours de la période visée
par les recours collectifs;
|
(b) un rapport de test de détection des anticorps
du VHC, un rapport de test ACP ou un rapport de test semblable
à l'égard du réclamant;
|
(c) une déclaration solennelle du réclamant,
indiquant i) qu'il n'a jamais utilisé de drogues
intraveineuses sans ordonnance, ii) qu'à sa connaissance,
il n'était pas infecté par le virus de l'hépatite
non A non B ou le VHC avant le 1er janvier 1986, iii)
l'endroit où le réclamant a reçu
pour la première fois une transfusion de sang au
Canada au cours de la période visée par
les recours collectifs, et iv) le lieu de résidence
du réclamant, tant au moment où il a reçu
pour la première fois une transfusion de sang au
Canada au cours de la période visée par
les recours collectifs qu'au moment de la remise de la
demande aux termes des présentes." |
9. Dans le cas présent, la réclamante répond
aux exigences établies dans les sous-paragraphes (b)
et (c). Elle répond également à l'exigence
du sous-paragraphe (a) relativement aux transfusions reçues
en février 1990. Cependant, elle ne répond pas
aux exigences relatives à toute autre transfusion au
cours de la période visée par les recours collectifs
et, notamment, la transfusion qu'elle prétend avoir
reçue en mars 1988.
10. Malheureusement pour la réclamante, le résultat
de la procédure d'enquête a indiqué qu'aucun
des donneurs du sang qu'elle a reçu en février
1990 était anti-VHC positif.
11. Le paragraphe 3.04 du Régime à l'intention
des transfusés infectés par le VHC prévoit,
en partie, ce qui suit :
" 3.04 Procédure d'enquête
|
(1) Malgré toute autre disposition du présent
régime, si les résultats d'une procédure
d'enquête démontrent que
aucun des
donneurs ou des unités de sang reçues par
une personne directement infectée ou une personne
directement infectée
au cours de la période
visée par les recours collectifs n'est ou n'était
anti-VHC positif, sous réserve des dispositions
du paragraphe 3.04(2), l'administrateur doit rejeter la
réclamation de cette personne infectée par
le VHC
|
(2) Le réclamant peut prouver que la personne
directement infectée
a été
infectée pour la première fois par le VHC
par suite d'une transfusion de sang reçue au Canada
au cours de la période visée par les recours
collectifs
en dépit des résultats
de la procédure d'enquête. Il est précisé
pour plus de certitude que les frais d'obtention de la
preuve visant à réfuter les résultats
d'une procédure d'enquête sont à la
charge du réclamant, sauf décision contraire
d'un juge arbitre, d'un arbitre ou d'un tribunal."
|
12. Dans le cas présent, les résultats de
la procédure d'enquête n'ont pas été
réfutés. Le paragraphe 7 de l'affidavit de la
réclamante indique ce qui suit :
"
Je n'ai aucun autre facteur de risque lié
à l'hépatite C. Je n'ai aucun tatouage et
tous les examens de la vue que j'ai eus avant de contracter
l'hépatite C ont simplement requis que je regarde
à travers une lentille. Je n'ai pas de dossier
indiquant que j'ai pris des drogues par voie intraveineuse
". |
13. J'accepte ce qui précède comme étant
des énoncés vrais de la part de la réclamante.
Cependant, je conclus qu'ils sont insuffisants pour réfuter
les résultats de la procédure d'enquête.
14. M. le juge Pitfield a discuté de l'importance
de la procédure d'enquête et du type de preuve
requis pour réfuter le résultat d'une enquête
dans la réclamation no 1300593. M. le juge Pitfield
a déclaré ce qui suit :
[11] Il est justifié de faire un certain nombre
d'observations en regard du paragraphe 3.04. D'abord,
la disposition prévue dans la Convention de règlement
pour établir l'admissibilité est qu'une
transfusion infectée a été reçue
durant la période visée par les recours
collectifs. Cependant, la réception d'une transfusion
infectée durant la période visée
par les recours collectifs est insuffisante pour établir
l'admissibilité, si le réclamant a également
reçu une transfusion infectée avant le début
de la période visée par les recours collectifs.
De plus, une personne infectée par le virus de
l'hépatite C est, jusqu'à preuve du contraire,
inadmissible si l'enquête de retraçage relative
aux transfusions durant la période visée
par les recours collectifs démontre qu'aucun des
donneurs de ce sang transfusé ne s'est avéré
anti-VHC positif selon le test de détection des
anticorps du VHC.
|
[12] Même si les personnes infectées par
le virus de l'hépatite C qui se sont vues refuser
l'indemnisation en raison du paragraphe 3.04 peuvent se
sentir lésées, les dispositions de la Convention
de règlement ont été proposées
par des conseillers juridiques au nom de toutes les parties
et endossées par les tribunaux de surveillance
de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec.
Le protocole d'enquête qui permet au départ
d'établir l'admissibilité a été
endossé par les tribunaux de surveillance. Étant
donné que des tests de détection de la présence
ou de l'absence des anticorps de l'hépatite C n'avaient
pas été effectués durant la période
visée par les recours collectifs, le protocole
a prévu qu'on devait prendre des mesures pour détecter
les donneurs du sang transfusé à un réclamant
durant la période visée par les recours
collectifs, peu importe que ces donneurs aient donné
du sang après la période visée par
les recours collectifs, que ces dons subséquents
aient subi le test de détection des anticorps du
VHC, et que le résultat du test ait été
positif ou négatif. S'il était impossible
de détecter le donneur ou si ce dernier n'avait
pas fait de don de sang à une date ultérieure,
si les résultats du test de détection des
anticorps n'étaient pas disponibles relativement
à ces dons ultérieurs ou si les résultats
du test de détection des anticorps du VHC étaient
positifs, le réclamant était admissible
à une indemnisation.
|
[13] Le protocole d'enquête a été
élaboré en s'appuyant sur les recherches
scientifiques à jour. La Convention de règlement
et le protocole ont été approuvés
par des conseillers juridiques au nom des membres des
recours collectifs et des défendeurs et par la
suite, par ordonnance des tribunaux. On a établi
que le protocole était le meilleur moyen de relier
l'infection à une transfusion de sang pour laquelle
la Convention de règlement prévoit une indemnisation.
|
[14] Alors que la raison principale pour établir
l'admissibilité est la procédure d'enquête,
un réclamant peut présenter des preuves
lors d'un renvoi à l'appui de la réclamation
qu'il a été infecté pour la première
fois durant la période visée par les recours
collectifs, malgré un résultat d'enquête
négatif. À mon avis, le paragraphe 3.04(2)
ne permet pas à un réclamant d'effectuer
sa propre procédure d'enquête. Le paragraphe
prévoit qu'il peut y avoir des preuves qui établiraient
que la source de l'infection, plus probablement que non
ou selon la prépondérance des probabilités,
était une transfusion reçue durant la période
visée par les recours collectifs. Ce n'est pas
la réponse pour un réclamant qui tente de
fournir de telles preuves à l'effet qu'un certain
pourcentage infime de la population peut être infecté
par des sources de VHC inconnues. Si une telle affirmation
était la réponse, un réclamant ne
pourrait jamais réfuter les résultats des
enquêtes de retraçage, parce qu'il ne pourrait
jamais prouver qu'il ne faisait pas partie de ce petit
pourcentage de la population ayant pu être ainsi
infecté.
|
[15] La preuve que le réclamant aurait à
présenter lors d'un renvoi comprendrait au moins
les dossiers médicaux personnels et familiaux complets
et des preuves détaillées sur tous les aspects
de son mode de vie, y compris des preuves d'absence de
possibilités d'être infecté par des
seringues ou des injections, peu importe la manière
et le but de sa réception. Les genres de preuves
que j'ai décrits ne visent pas à être
exhaustifs. Ils visent plutôt à indiquer
le processus à suivre lorsqu'on tente de réfuter
le résultat de l'enquête de retraçage.
|
[16] La simple négation par un réclamant
de son passé ou de ses activités personnelles
présentées comme sources possibles de non
transfusion d'une infection par le VHC ne suffirait pas.
Il faudrait que la fiabilité de l'affirmation subjective
de nature soit vérifiée par un renvoi à
toutes les preuves objectives connues. Une des pièces
comme preuve objective comprend les résultats de
l'enquête de retraçage qui s'appuie sur l'application
du protocole d'enquête approuvé et / ou conforme
à celui-ci. Il faudrait que des preuves objectives
contradictoires soient très persuasives si le résultat
de l'enquête devait être réfuté.
[C'est nous qui soulignons]
|
15. J'adopte le raisonnement de M. le juge Pitfield. Procéder
autrement signifierait ignorer le libellé et l'intention
du paragraphe 3.04. Dans les circonstances, je dois conclure
que le paragraphe 7 de l'affidavit de la réclamante
constitue rien de plus qu'un simple refus d'autres facteurs
de risque et qu'il ne suffit pas à contredire les résultats
de la procédure de retraçage.
16. Pour ce qui est de la transfusion que la réclamante
croit avoir reçue en mars 1988, il a déjà
été indiqué que la réclamante
n'a pas présenté de dossiers confirmant ce qui
précède tel que requis en vertu du paragraphe
3.01(1)(a). Dans de telles circonstances, le paragraphe 3.01(2)
s'applique. Il se lit comme suit :
" 3.01 Réclamation par une personne
directement infectée
|
(2) Malgré les dispositions du paragraphe 3.01(1)a),
si un réclamant ne peut se conformer aux dispositions
du paragraphe 3.01(1)a), il doit remettre à l'administrateur
une preuve corroborante et indépendante des souvenirs
personnels du réclamant ou de toute personne qui
est membre de la famille du réclamant, établissant
selon la prépondérance des probabilités
qu'il a reçu une transfusion de sang au Canada
au cours de la période visée par les recours
collectifs. " |
17. Comme on peut aisément le voir, le paragraphe
3.01(2) exige une preuve corroborante indépendante
du souvenir personnel de la réclamante ou de toute
personne qui est un membre de la famille de la réclamante.
La seule preuve devant moi à l'effet que la réclamante
a reçu une transfusion en mars 1988 est le propre affidavit
de la réclamante et l'affidavit de son conjoint. En
conséquence, je suis tenu de déclarer que la
réclamante n'a pas répondu aux exigences du
paragraphe 3.01(1)(a) ou du paragraphe 3.01(2).
18. Il va sans dire qu'on ne peut s'empêcher d'être
sympathique à l'endroit de la réclamante et
de la souffrance qu'elle vit. Cependant, le rôle de
l'Administrateur en vertu de la Convention de règlement
est d'administrer le Régime à l'intention des
transfusés infectés par le VHC conformément
à ses modalités. L'Administrateur n'est pas
autorisé à modifier ou à ignorer les
modalités du Régime, ni l'arbitre lorsqu'il
est appelé à examiner les décisions de
l'Administrateur.
19. Par conséquent, le refus de l'Administrateur de
la demande d'indemnisation de la réclamante est par
la présente maintenu.
FAIT à Halifax, en Nouvelle-Écosse, ce 27e
jour de février 2004.
_______________________________
S. BRUCE OUTHOUSE, c.r.
Arbitre
|