Renvois : Décisions
homologuées par le juge-arbitre : #63 - Le 15 octobre
2002
D É C I S I O N
Contexte :
La Succession du réclamant, (la " Succession
") a présenté une demande d'indemnisation
en vertu de la Convention de règlement relative à
l'hépatite C (1986-1990) ( la " Convention ")
et de l'annexe A - Régime à l'intention des
transfusés infectés par le VHC (le " Régime
" ).
Dans une lettre en date du 30 octobre 2001, l'Administrateur
du Fonds (l' " Administrateur ") a rejeté
la réclamation en raison de l'insuffisance de preuve
à l'effet que le décès du réclamant
avait été causé par son infection par
l'hépatite C (" VHC ").
La Succession a demandé qu'un juge-arbitre soit saisi
de la décision de l'Administrateur en audition orale.
Preuves :
Les faits suivants n'ont pas été contestés
:
- Le réclamant était infecté par le
VHC;
- Le réclamant est décédé le 31
octobre 1998, de multiples traumatismes causés par
un accident d'automobile; et
-Le médecin traitant du réclamant a indiqué
sur le formulaire TRAN 2 que l'infection par le VHC du réclamant
n'avait pas contribué de façon substantielle
à son décès.
Lors de l'audition, la mère et le fils du réclamant
ont tous deux témoigné. Selon leurs témoignages,
il était clair que l'infection par le VHC du réclamant
avait considérablement diminué tant sa qualité
de vie que leur capacité de pouvoir jouir de sa compagnie.
En outre, son incapacité de pouvoir travailler au fur
et à mesure que son état de santé se
détériorait a créé de graves difficultés
financières à sa famille.
Le médecin traitant du réclamant a aussi témoigné
lors de l'audition. Il était le médecin traitant
du réclamant de 1992 jusqu'à son décès.
Le médecin traitant a décrit la détérioration
de l'état de santé du réclamant à
compter du moment où son infection par le VHC a été
diagnostiquée en 1993 jusqu'à la période
qui a précédé de peu son accident.
Le réclamant a été examiné par
son médecin traitant environ un mois avant son décès.
À cette occasion, le réclamant se disait optimiste
quant à son état de santé et envisageait
de retourner au travail. Même si le médecin traitant
estimait que cela était irréaliste, il a par
ailleurs témoigné que le réclamant aurait
peut-être pu vivre dix autres années, étant
donné qu'il est impossible de prédire le moment
du décès d'une personne infectée par
le VHC.
Dispositions pertinentes du Régime :
5.01 Indemnisation en cas de décès avant le
1er janvier 1999
(1) Si une personne infectée par le VHC décède
avant le 1er janvier 1999 et que son représentant personnel
au titre du VHC remet à l'Administrateur la preuve
exigée aux termes de l'article trois dans le délai
prévu au paragraphe 3.05, le représentant personnel
reconnu au titre du VHC a droit au remboursement des frais
funéraires non assurés engagés, jusqu'à
concurrence de 5 000 $, et sous réserve des dispositions
du paragraphe 5.01(2), le représentant personnel reconnu
au titre du VHC se verra payer la somme de 50 000 $ en règlement
intégral de toutes les réclamations que la personne
infectée par le VHC aurait pu faire aux termes du présent
régime si elle avait été vivante le 1er
janvier 1999 ou par la suite. Ce paiement de 50 000 $ au représentant
personnel reconnu au titre du VHC s'ajoute aux réclamations
des personnes à charge et des autres membres de la
famille aux termes de l'article six et ne portera pas atteinte
à la réclamation personnelle d'un conjoint ou
d'un enfant qui est aussi une personne infectée par
le VHC.
...[C'est nous qui soulignons]
6.01 Indemnisation des personnes reconnues à charge
(1) Si une personne infectée par le VHC décède
et que le décès a été causé
par son infection par le VHC, les personnes reconnues à
charge de cette personne infectée par le VHC auront
le droit d'être indemnisées de leur perte de
soutien. La perte de soutien est d'un montant pour chaque
année civile égal à 70 % de la perte
annuelle de revenu net de la personne infectée par
le VHC décédée pour cette année
jusqu'à la date où elle aurait atteint l'âge
de 65 ans, calculé aux termes du paragraphe 4.02(2),
étant entendu toutefois que le montant annuel payable
aux termes de cette disposition sera réduit d'un montant
égal à 30 % du montant net calculé attribuable
aux frais de subsistance personnels de la personne infectée
par le VHC, étant entendu toutefois que, aux fins de
calculer le montant annuel payable aux termes de la présente
disposition, le " revenu net après réclamation
" sera calculé sans tenir compte des clauses A),
C) et D) de la définition de " revenu net après
réclamation " et que les mots " la personne
" et " pour cause de maladie ou d'invalidité
au cours de l'année " contenus à la clause
B) et les mots " la personne " contenus à
la clause E) de la définition de " revenu net
après réclamation " ont été
remplacés par les mots " les personnes à
charge par suite du décès de la personne ".
[C'est nous qui soulignons]
3.05 Réclamation par le représentant personnel
d'une personne infectée par le VHC
(1) Quiconque prétend être le représentant
personnel au titre du VHC d'une personne infectée par
le VHC décédée doit remettre à
l'Administrateur, dans les trois ans suivant le décès
de cette personne infectée par le VHC ou dans les deux
ans suivant la date d'approbation, selon la dernière
de ces éventualités à survenir, un formulaire
de demande établi par l'Administrateur accompagné
des documents suivants :
(a) la preuve que le décès de la personne infectée
par le VHC fut causé par son infection par le VHC;
[C'est nous qui soulignons]
3.06 Réclamation par une personne à charge
Quiconque prétend être une personne à
charge d'une personne infectée par le VHC décédée
doit remettre à l'Administrateur, dans les deux ans
suivant le décès de cette personne infectée
par le VHC ou dans les deux ans suivant la date d'approbation
ou encore dans un délai d'un an après que le
réclamant a atteint la majorité, selon la dernière
de ces éventualités à survenir, un formulaire
de demande établi par l'Administrateur accompagné
des documents suivants :
(a) une preuve comme l'exigent les paragraphes 3.05(1)a) et
b) (ou, le cas échéant, les paragraphes 3.05(3)
ou (4)) et les paragraphes 3.05(5) et (6), à moins
que la preuve exigée n'ait déjà été
remise à l'Administrateur; ... [C'est nous qui soulignons]
3.07 Réclamation par le membre de la famille
Quiconque prétend être un membre de la famille,
au sens du paragraphe a) de la définition de membre
de la famille au paragraphe 1.01, d'une personne infectée
par le VHC décédée doit remettre à
l'Administrateur, dans les deux ans suivant le décès
de cette personne infectée par le VHC ou dans les deux
ans suivant la date d'approbation ou encore dans un délai
d'un an après que le réclamant a atteint la
majorité, selon la dernière de ces éventualités
à survenir, un formulaire de demande établi
par l'Administrateur accompagné des documents suivants
:
(a) une preuve comme l'exigent les paragraphes 3.05(1)a) et
b) (ou, le cas échéant, les paragraphes 3.05(3)
ou (4)) et les paragraphes 3.05(5) et (6), à moins
que la preuve exigée n'ait déjà été
remise à l'Administrateur; ...[C'est nous qui soulignons]
Arguments :
La Succession a soutenu que le réclamant avait été
infecté par le VHC suite à une transfusion de
sang reçue lors d'un accident de travail le 6 janvier
1988. Par conséquent, la Succession a soutenu que l'accident
qui a causé le décès du réclamant
a simplement changé la date de son décès
- et non pas l'inévitabilité de son décès.
La Succession a soutenu que la famille du réclamant
pouvait présenter une réclamation en vertu de
deux articles, les articles 5.01 et 6.01.
La Succession a soutenu que rien dans le paragraphe 5.01 ne
requiert que le décès du réclamant résulte
de son infection par le VHC.
La Succession a concédé que l'article 6 empêche
expressément qu'une demande soit présentée,
à moins de pouvoir démontrer que le décès
du réclamant a été causé par son
infection par le VHC.
Cependant, la Succession a signalé que le réclamant
et la famille du réclamant avaient souffert autant
que d'autres dans leur situation, et qu'il était inéquitable
qu'ils ne pouvaient pas recevoir d'indemnisation en vertu
de la Convention.
La Succession a soutenu que, compte tenu de l'intention du
Régime, la date du décès n'était
pas importante pour les besoins du paragraphe 6.01. Plutôt,
la Succession a soutenu que la question était de savoir
si le réclamant serait décédé
des suites de son infection par le VHC, si l'accident
d'automobile n'avait pas eu lieu. La Succession a soutenu
que le décès du réclamant était
imminent en raison de son infection par le VHC.
L'Administrateur a aussi signalé que le paragraphe
5.01 requiert expressément les mêmes preuves
que l'article trois pour établir le droit à
l'indemnisation (voir les caractères gras). Par conséquent,
l'Administrateur a soutenu que les exigences des articles
5 et 6 sont les mêmes, en ce que les deux exigent des
preuves que le décès du réclamant ait
été causé par son infection par le VHC.
L'Administrateur a aussi signalé qu'en dépit
de l'argument contraire de la Succession, le médecin
traitant du réclamant avait témoigné
qu'il aurait pu vivre dix années de plus. Par conséquent,
même si le droit à l'indemnisation avait été
basé sur une preuve de décès imminent
suite à l'infection par le VHC, cette preuve manquait
dans le cas présent.
L'Administrateur a aussi soutenu que les dispositions de la
Convention et du Régime sont claires quant aux paramètres
touchant les droits à l'indemnisation et que ni l'Administrateur
ni un juge-arbitre n'ont la discrétion d'y déroger.
Analyse :
Le paragraphe 6.01 établit clairement les exigences
de preuves à l'effet que le décès du
réclamant a été causé par son
infection par le VHC.
Je constate que le paragraphe 5.01 comprend la même
exigence en se référant aux preuves exigées
sous l'article 3.
Le paragraphe 3.05(1)(a) de la Convention exige, comme épreuve
seuil pour une réclamation, la preuve que le décès
d'un réclamant a été causé par
son infection par le VHC. En outre cette exigence est comprise
dans les paragraphes 3.06 et 3.07.
La Succession doit donc établir que le décès
du réclamant a été causé par son
infection par le VHC.
La Succession n'a pas fourni de preuve à l'effet que
le décès du réclamant avait été
causé par son infection par le VHC. Les preuves ont
plutôt établi clairement que son décès
avait été causé par un accident d'automobile,
et c'est ce que j'ai conclu.
C'est regrettable pour la famille du réclamant, étant
donné qu'il est clair que ses membres ont beaucoup
souffert, suite à l'infection du réclamant par
le VHC.
Cependant, ni l'Administrateur ni moi, comme juge-arbitre,
n'avons la discrétion d'accorder une indemnisation
dans les circonstances où le décès d'une
personne infectée par le VHC ne peut être attribué
à cette infection.
En conséquence, je conclus que l'Administrateur a déterminé
correctement que la Succession du réclamant n'a pas
droit à une indemnisation en vertu de la Convention
étant donné que son décès n'a
pas résulté de son infection par le VHC.
Décision :
La décision de l'Administrateur de rejeter la demande
d'indemnisation en vertu de la Convention de règlement
des recours collectifs relatifs à l'hépatite
C (1986-1990) est maintenue.
FAIT À TORONTO, CE 15e JOUR D'OCTOBRE 2002.
Tanja Wacyk, juge- arbitre
|