| Renvois : Décisions 
                    homologuées par le juge arbitre : #100 - Le 7 août 
                    2003  D É C I S I O NLa réclamante présente en octobre 2000 une 
                    réclamation, dans le cadre de la convention de règlement 
                    relative à l'hépatite C pour la période 
                    du 1er janvier 1986 au 1er juillet 1990, à titre de 
                    personne directement infectée. L'administrateur a, par lettre du 11 février 2002, 
                    rejeté la réclamation, basant sa décision 
                    sur le fait que la réclamante n'avait pas fourni preuve 
                    suffisante qu'elle a reçu du sang (tel que défini 
                    à l'article 1.01 du "régime à l'intention 
                    des transfusés infectés par le VHC") au 
                    cours de la période prévue à l'entente. 
                    À sa lettre de refus, l'administrateur écrivait 
                    "(vous avez) reçu une injection immunoglobuline 
                    sérique pour hépatite A. L'immunoglobuline sérique 
                    est un produit qui provient de plusieurs donneurs et ne rencontre 
                    pas la définition du mot "sang" ( ) d'après 
                    la convention de règlement relative à l'hépatite 
                    C de 1986-1990". La réclamante en appelle de telle décision 
                    et demande au juge-arbitre de renverser la décision 
                    de l'administrateur. Il y a eu audition devant Me Martin Hébert, 
                    le 25 février 2003, mais Me Hébert ayant été 
                    nommé Juge à la Cour du Québec avant 
                    d'avoir pu compléter cette audition et rendre sa décision, 
                    le soussigné a dû reprendre l'audition, ce qui 
                    fut fait le 30 juillet 2003. La réclamante est une dame de 58 ans qui a reçu, 
                    le 15 juillet 1986, un traitement prophylactique suite à 
                    la découverte, chez son fils, alors âgé 
                    de 6 ans, d'une maladie qui était alors non identifiée. 
                    Madame a donc reçu, le 15 juillet 1986, 2ml d'immuno-globuline, 
                    mais aucune précision n'est disponible quant au type 
                    précis d'immu-noglobuline reçue. L'argument de la réclamante peut être résumé 
                    comme suit:
 · le dossier du centre hospitalier où madame 
                    a reçu un "produit sanguin", en juillet 1986, 
                    est muet quant au type précis d'immunoglobuline reçue;
 
 · les démarches qui ont été faites 
                    à ce sujet, par la réclamante et par Héma-Québec, 
                    n'ont pas donné plus de renseignements;
 
 · les médecins étant, en juillet 1986, 
                    incertains à savoir si son fils souffrait d'hépatite 
                    A ou d'hépatite B, la réclamante dit-elle n'a 
                    pas nécessairement reçu l'immunoglobuline sérique 
                    (pour l'hépatite A), ni l'immunoglobuline anti-hépatitique 
                    B, mais possiblement ce qu'elle décrit comme étant 
                    une "hyper-immunoglobuline hépatite A-hépatite 
                    B", laquelle n'est pas exclue à la définition 
                    de sang, tel que formulé à l'article 1.01du 
                    régime;
 
 · ayant prouvé avoir reçu une immunoglobuline 
                    quelconque durant la période de la convention et ayant 
                    été diagnostiquée quelques années 
                    plus tard comme souffrant de l'hépatite C, madame estime 
                    avoir ainsi rencontré le seuil requis pour avoir droit 
                    à une indemnité;
 
 · rencontrant la preuve requise, c'est ensuite au Fonds 
                    dit-elle d'établir que ce qu'elle a reçu est 
                    exclu de la définition, et madame ajoute que le Fonds 
                    n'a pas rencontré ce fardeau;
 
 · l'immunoglobuline reçue en juillet 1986 est 
                    la seule source possible de contamination;
 Il est non contesté que madame soit porteuse de l'hépatite 
                    C depuis 1995, ni est-il contesté qu'elle a reçu 
                    "une immunoglobuline" le 15 juillet 1986. La nature 
                    exacte de telle immunoglobuline est remise en question, madame 
                    disant, tel que mentionné ci-haut, qu'il est possible 
                    que ce fut une globuline sérique ou une immunoglobuline 
                    anti-hépatitique B, mais que de façon plus vraisemblable, 
                    ce serait une hyper-immunoglobuline hépatite A-hépatite 
                    B. Elle ignore toutefois si une telle hyperimmuno-globuline 
                    était disponible à l'hôpital où 
                    elle a reçu son traitement prophylactique ou même 
                    si un tel produit existait en 1986. Aucune preuve n'a été 
                    présentée à ce sujet. Alors que l'immunoglobuline reliée à l'hépatite 
                    B est spécifiquement prévue aux exclusions reliées 
                    à la définition de sang, ce qui est donné 
                    de façon prophylactique pour l'hépatite A n'y 
                    est pas clairement mentionné. Dans un rapport écrit 
                    signé par le Dr Martin Champagne, directeur médical 
                    de la banque de sang de l'Hôpital Sainte-Justine, rapport 
                    daté du 28 mai 2003 et déposé par les 
                    procureurs du Fonds, Dr Champagne a indiqué que "les 
                    immunoglobulines aministrées de façon prophylactique 
                    contre l'hépatite A
 sont des immunoglobulines 
                    sériques". L'immunoglobuline sérique 
                    se retrouve dans les exclusions de la définition de 
                    sang, telle que formulée au paragraphe 1.01 du régime 
                    à l'intention des transfusés. La réclamante a présenté une argumentation 
                    écrite et un témoignage à la fois bien 
                    structuré, bien articulé et rempli d'émotion. 
                    Elle est convaincue d'avoir contracté l'hépatite 
                    C suite à la transfusion d'immunoglobuline en juillet 
                    1986 et elle estime avoir ainsi rempli son devoir pour bénéficier 
                    de l'entente. Si les administrateurs du Fonds ne sont pas 
                    d'accord avec sa réclamation, ce sont à eux, 
                    dit-elle, que revient le fardeau de prouver qu'elle n'a pas 
                    droit à quelque bénéfice et elle ajoute 
                    que les gens du Fonds n'ont pas réussi à rencontrer 
                    ce fardeau. L'article 3.01(1) du régime a l'intention des transfusés 
                    se lit comme suit:
 "quiconque prétend être une personne 
                    directement infectée doit remettre à l'administrateur 
                    un formulaire de demande établi par l'administrateur 
                    accompagné des documents suivants:
  a) des dossiers médicaux, cliniques, de laboratoire, 
                    d'hôpital, de la Société canadienne de 
                    la Croix-Rouge, de la Société canadienne du 
                    sang ou d'Héma-Québec démontrant que 
                    le réclamant a reçu une transfusion de sang 
                    au Canada au cours de la période visée par les 
                    recours collectifs.  (les soulignés sont les nôtres) La réclamante rencontre-t-elle ce premier critère, 
                    à savoir si elle a reçu une transfusion de sang 
                    au sens de l'entente durant la période couverte par 
                    telle entente? Le sang est défini à l'article 
                    1.01 du :  ""sang", le sang total et les 
                    produits sanguins suivants: les concentrés de globules 
                    rouges, les plaquettes, le plasma (frais congelé et 
                    stocké) et les globules blancs. Le sang ne comprend 
                    pas l'albumine à 5%, l'albumine à 25%, le facteur 
                    VIII, le facteur VIII porcin, le facteur IX, le facteur VII, 
                    l'immunoglobuline anti-cytomégalovirus, l'immunoglobuline 
                    anti-hépatitique B, l'immunoglobuline anti-Rh, l'immunoglobuline 
                    antivaricelleuse-antizostérienne, l'immunoglobuline 
                    sérique, (FEIBA) FEVIII Inhibitor Bypassing Activity, 
                    Autoplex (complexe prothrombine), l'immunoglobuline antitétanique, 
                    l'immunoglobuline intraveineuse (IVIG) et l'antithrombine 
                    III (ATIII)." La preuve qui m'est présentée est que ce qui, 
                    à l'époque, était donné à 
                    titre de protection contre l'hépatite A est une immunoglobuline 
                    sérique (rapport du Dr Champagne précité). 
                    Or, l'immunoglobuline sérique est prévue dans 
                    la longue liste des exclusions prévues à la 
                    définition du sang. Si madame a reçu une protection 
                    contre l'hépatite B, cette immunoglobuline dite anti-hépatitique 
                    B est également nommément prévue aux 
                    mêmes exclusions. Je ne peux retenir la possibilité 
                    non substantiée par quelque preuve que ce soit que 
                    madame aurait pu recevoir quelque chose autre que l'immunoglobuline 
                    sérique ou autre que l'immunoglobuline anti-hépatitique 
                    B. J'en viens donc à la conclusion, bien à regret, 
                    que les seuls produits sanguins que madame a reçus 
                    durant la période de l'entente sont exclus de la définition 
                    de sang et que dès lors, le recours de la réclamante 
                    ne peut réussir. La réclamante soulève le fait que la preuve 
                    requise des victimes dans le programme à l'intention 
                    des hémophiles est différente de celle exigée 
                    des transfusés non-hémophiles et que donc le 
                    programme d'aide qui lui est ouvert est discriminatoire. Je 
                    suis incapable d'en arriver à cette même conclusion. 
                    Je note seulement que le fardeau est effectivement différent 
                    en ce que certains produits sanguins (tels certains facteurs 
                    de coagulation et le cryoprécipité) entrent 
                    dans la définition de "sang" selon l'annexe 
                    "B" (régime à l'intention des hémophiles), 
                    mais non sous l'annexe "A". Tout ce que je peux 
                    en conclure est que les parties ayant négocié 
                    et convenu de l'entente ont voulu mettre en place deux régimes 
                    différents à l'intérieur desquels les 
                    victimes doivent se situer pour tirer avantage de l'un ou 
                    l'autre programmes. D'ailleurs, sans que cela soit nécessairement 
                    significatif pour le présent dossier, je note que même 
                    pour un réclamant hémophile, l'immunoglobuline 
                    sérique et l'immunoglobuline anti-hépatitique 
                    B sont exclues de la définition de "sang". La réclamante tire un argument du passage suivant 
                    de la décision de madame la juge Nicole Morneau dans 
                    l'affaire David Page c. Le Procureur Général 
                    du Canada et al., (500-06-000068-987 Cour supérieure, 
                    district de Montréal):  "L'entente élimine pour les membres du groupe 
                    les difficultés résultant du fardeau de la preuve 
                    et du risque de rejet au motif de prescription. Les délais 
                    écoulés entre la connaissance de l'infection 
                    et le dépôt de l'action seraient, dans bien des 
                    cas, fatals."  L'on retrouve d'ailleurs un passage quasi-identique dans 
                    la décision Dominique Honhon c. Le Procureur Général 
                    du Canada et al., (500-06-000016-960, Cour supérieure, 
                    district de Montréal). La réclamante tire donc de cet extrait de la décision 
                    de madame la juge Morneau l'argument à l'effet que 
                    le fardeau de preuve a été renversé et 
                    qu'il repose dorénavant sur l'administrateur du Fonds. Je ne peux tirer de ces deux décisions l'argument 
                    que semble y trouver la réclamante. Les "membres 
                    du groupe" n'ont qu'à rencontrer les exigences 
                    prévues par le régime [telles celles de l'article 
                    3.01(1)] et ainsi ils ont un fardeau beaucoup moins lourd 
                    et beaucoup moins onéreux que ce qu'ils auraient à 
                    rencontrer, eussent-ils pris une action distincte contre l'auteur 
                    des dommages. Ils ont quand même un fardeau à 
                    rencontrer et j'estime que la réclamante a malheureusement 
                    failli à cette tâche. J'ai lu et relu avec beaucoup d'attention l'argumentation 
                    écrite de la réclamante et je suis très 
                    sensible au drame humain qu'elle et son mari vivent depuis 
                    1995. Malheureusement, peut-être que le règlement 
                    proposé est bien imparfait en ce qui la concerne, mais 
                    il a été entériné par la Cour 
                    et a maintenant force de loi. Mon rôle en tant que juge-arbitre 
                    n'est pas de rendre une décision sur ce que j'aurais 
                    aimer voir dans l'entente ou sur ce qui accommoderait plus 
                    des réclamants de bonne foi comme l'est sans aucun 
                    doute la présente réclamante. Je me dois d'étudier 
                    le texte de l'entente tel qu'il a été complété 
                    et approuvé par les Tribunaux. Malgré toute la sympathie que j'ai pour la réclamante 
                    et son mari, je conclus que la décision de l'administrateur 
                    a été rendue correctement et que la demande 
                    de renvoi est mal fondée.  Montréal, le 7 août 2003  Jacques NolsJuge-arbitre
  
                    
						
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