| Renvois : Décisions 
                    homologuées par le juge arbitre : #46 - Le 10 juin 2002 D É C I S I O NNuméro de réclamation : 1100082
 1. Le 14 février 2002, l'Administrateur a refusé 
                    la demande du réclamant relativement au calcul du montant 
                    d'indemnisation représentant sa perte de revenu. 
 2. Le réclamant a demandé qu'un juge-arbitre 
                    soit saisi de la décision de l'Administrateur.
 
 3. Le réclamant a demandé une audition orale 
                    par le juge-arbitre.
 
 4. L'audition a eu lieu devant moi le 23 mai 2002, à 
                    Vancouver.
 
 5. Aucune des parties n'a contesté le fait que le réclamant 
                    était bien une personne directement infectée 
                    conformément aux dispositions de la Convention de règlement 
                    relative à l'hépatite C 1(1986-1990).
 
 6. Le 19 juin 2000, la demande d'indemnisation du réclamant 
                    a été approuvée conformément à 
                    la Convention de règlement. Une indemnisation a été 
                    approuvée aux niveaux 1 et 2.
 
 7. Le réclamant s'objecte au calcul du montant d'indemnisation 
                    qui lui a été accordé pour perte de revenu. 
                    Son objection porte sur ce qui suit :
 " Ce montant ne reflète pas la situation financière 
                    d'un propriétaire de bijouterie de prestige, gérant, 
                    directeur, travailleur bijoutier et maître concepteur 
                    en orfèvrerie ayant mon expérience et niveau 
                    d'emploi. "
 Voilà essentiellement l'enjeu du différend 
                    qui est porté à mon attention. 
 8. Les faits essentiels ne sont pas contestés par les 
                    parties et peuvent se résumer comme suit :
 
 (a) En 1989, le réclamant a acheté une entreprise 
                    de bijouterie établie à Vancouver. L'entreprise 
                    était détenue en copropriété par 
                    lui et son épouse.
 (b) Le réclamant est orfèvre et réparateur 
                    de montres autorisé. Il a travaillé à 
                    temps plein dans ce magasin environ 80 à 90 heures 
                    par semaine à concevoir des montures de bijouterie 
                    serties de pierres précieuses et à réparer 
                    des montres.
 (c) L'entreprise du réclamant avait à son emploi 
                    des commis orfèvres, horlogers et vendeurs. La femme 
                    du réclamant a travaillé dans l'entreprise durant 
                    quelque temps, mais en 1995, elle est retournée à 
                    la profession d'infirmière à temps plein.
 (d) En 1996, la femme du réclamant a quitté 
                    en emportant avec elle plusieurs
 dossiers de l'entreprise.
 (e) En 1997, l'entreprise a dû fermer ses portes en 
                    raison de rénovations majeures à la structure 
                    du bâtiment. Le réclamant avait prévu 
                    réouvrir le magasin aussitôt que les rénovations 
                    seraient terminées dix mois plus tard. Cependant, les 
                    rénovations ont duré plus de 2 ans et à 
                    ce moment, le réclamant était trop malade pour 
                    continuer à exploiter son entreprise.
 (f) Le réclamant a désigné les années 
                    1995, 1996 et 1997 comme période de calcul de son revenu 
                    net pré-réclamation en vertu de l'article 4.02(2)(b) 
                    de la Convention de règlement.
 (g) La demande soumise à mon attention porte sur l'année 
                    post-réclamation
 2000 et comprend la perte de revenu du réclamant pour 
                    l'année en question.
 
 9. Lorsque la demande a été faite initialement, 
                    l'Administrateur a examiné la documentation d'appui. 
                    Il semble qu'il y avait plusieurs lacunes et les documents 
                    soumis n'appuyaient pas les montants demandés. Apparemment, 
                    le réclamant était impliqué dans un différend 
                    avec son comptable au sujet de services de comptabilité 
                    impayés à ce dernier qui refusait de fournir 
                    tous les documents jusqu'à qu'il soit payé pour 
                    ses services. Le réclamant n'était pas en mesure 
                    de payer ces montants et les documents d'appui manquants n'ont 
                    pu être remis à l'Administrateur.
 
 10. Comme l'Administrateur était incapable de calculer 
                    le revenu gagné durant les années pré-réclamation, 
                    il a cherché une autre approche pour obtenir une estimation 
                    du revenu gagné durant ces années.
 
 11. L'Administrateur a retenu un cabinet d'experts-comptables 
                    indépendant pour effectuer le calcul neutre approprié. 
                    Le cabinet d'experts-comptables a effectué une analyse 
                    contenue dans un rapport qui a été déposé 
                    comme preuve devant moi.
 
 12. Le cabinet d'experts-comptables a établi que le 
                    taux de salaire moyen pour les bijoutiers, réparateurs 
                    de montre et occupations connexes, selon les données 
                    fournies par Développement des ressources humaines 
                    Canada pour la région comprenant Vancouver, était 
                    de 14,36 $ l'heure. En utilisant la semaine de travail de 
                    quarante heures comme base de calcul multiplié par 
                    le taux horaire annualisé, le revenu brut pré-réclamation 
                    serait de 29 869 $. Cette somme est plus élevée 
                    que le revenu brut pré-réclamation demandé 
                    par le réclamant pour les années 1995, 1996 
                    et 1997. L'Administrateur a accepté le calcul du cabinet 
                    d'experts-comptables et a appliqué les modalités 
                    de la Convention de règlement, en particulier l'article 
                    7.03, et il a conclu que la perte de revenu pour 2000 totalisait 
                    15 971,89 $.
 
 13. Lors de l'audition devant moi, le représentant 
                    du réclamant a appelé un certain nombre de témoins, 
                    y compris le réclamant et a fourni des arguments supplémentaires 
                    par écrit. Le point majeur du différend était 
                    que le rapport du cabinet d'experts-comptables était 
                    erroné en utilisant la semaine de travail de quarante 
                    heures comme base de calcul. Les témoins, y compris 
                    le réclamant, ont témoigné qu'en fait, 
                    le propriétaire d'une bijouterie comme celle exploitée 
                    par le réclamant faisait normalement une semaine du 
                    travail de quatre-vingts à quatre-vingt-dix heures. 
                    De plus, les témoins ont expliqué comment la 
                    valeur de l'entreprise pourrait augmenter en investissant 
                    les profits dans l'inventaire et ils ont décrit les 
                    nombreux avantages fiscaux pouvant être encourus en 
                    exploitant une telle entreprise.
 
 14. Il est inutile de préciser en détail les 
                    arguments exprimés avec force par le représentant 
                    de réclamant. L'argument de base du réclamant 
                    est qu'il acceptait le calcul du taux horaire de 14,36 $, 
                    mais que ce chiffre devrait être multiplié par 
                    un montant de quatre-vingts à quatre-vingt-dix heures 
                    par semaine et non quarante, en assumant qu'il est raisonnable 
                    de supposer que le propriétaire gagnerait substantiellement 
                    plus qu'un commis employé dans le même magasin.
 
 15. Le Conseiller du Fonds n'a pas appelé de témoins 
                    mais a déposé des arguments utiles. Il a soutenu 
                    que le réclamant n'avait pas satisfait à l'obligation 
                    initiale de fournir la documentation requise par l'Administrateur. 
                    En conséquence, il avait bénéficié 
                    gratuitement du fait que l'Administrateur avait dû retenir 
                    un cabinet d'experts-comptables de l'extérieur dont 
                    les conclusions ont dépassé ce que l'Administrateur 
                    aurait autrement décidé comme montant dû 
                    au réclamant. Par conséquent, le Conseiller 
                    soutient que la demande du réclamant doit être 
                    refusée.
 
 16. Les modalités pertinentes de la Convention de règlement 
                    sont les suivantes :
 2. Chaque personne reconnue infectée par le VHC qui 
                    a le droit de recevoir l'indemnisation de la perte passée, 
                    présente ou future de revenu attribuable à son 
                    infection par le VHC se verra verser chaque année civile, 
                    sous réserve des dispositions du paragraphe 7.03, une 
                    somme égale à 70 % de sa perte annuelle de revenu 
                    net jusqu'à ce qu'elle atteigne l'âge de 65 ans, 
                    calculée conformément aux dispositions suivantes 
                    :
 a. La " perte annuelle de revenu net " pour une 
                    année désigne l'excédent du revenu net 
                    avant réclamation de la personne reconnue infectée 
                    par le VHC pour cette même année sur son revenu 
                    net après réclamation pour cette année.b. le " revenu net avant réclamation " d'une 
                    personne reconnue infectée par le VHC pour une année 
                    désigne un montant calculé comme suit :
 i. Un montant égal à la moyenne de ses trois 
                    meilleures années consécutives de revenu gagné 
                    qui précèdent le droit qu'a cette personne infectée 
                    par le VHC de recevoir une indemnisation aux termes du présent 
                    paragraphe 4.02 multiplié par le ratio que représente 
                    l'indice de pension pour l'année par rapport à 
                    l'indice de pension pour la seconde des trois années 
                    consécutives précitées ou, si la personne 
                    reconnue infectée par le VHC ou l'Administrateur démontre, 
                    selon la prépondérance des probabilités, 
                    que son revenu gagné pour cette année aurait 
                    été supérieur ou inférieur à 
                    cette moyenne n'eut été son infection par le 
                    VHC, ce montant supérieur ou inférieur (le montant 
                    applicable étant ci-après appelé le " 
                    revenu brut avant réclamation "), étant 
                    entendu que le montant calculé aux termes du présent 
                    paragraphe 4.02(2)b)i) ne dépassera pas 75 000 $ multiplié 
                    par le ratio que représente l'indice de pension pour 
                    l'année par rapport à l'indice de pension pour 
                    1999, moins 
 ii. Les déductions normales qui seraient payables par 
                    la personne reconnue infectée par le VHC sur le montant 
                    calculé aux termes du paragraphe 4.02(2)b)i) en présumant 
                    que ce montant représente le seul revenu de la personne 
                    reconnue infectée par le VHC pour cette année.
  17. Comme je l'ai noté, le réclamant n'a pas 
                    fourni la documentation nécessaire à l'Administrateur 
                    en raison de son différend avec son comptable. Et il 
                    n'a déposé aucun tel document devant moi. Lors 
                    de l'audition, le réclamant n'a pas demandé 
                    de soumettre les dossiers ou de faire comparaître le 
                    comptable durant les procédures. Si l'Administrateur 
                    n'avait pas cherché à l'extérieur une 
                    méthode de calcul pour la perte de revenu, j'aurais 
                    été d'accord avec le Conseiller du Fonds que 
                    la demande devait être rejetée en raison de l'échec 
                    du réclamant de fournir les renseignements requis en 
                    vertu de l'application de l'article cité plus haut.
 
 18. La Convention de règlement est une entente approuvée 
                    par les tribunaux qui ne peut pas être modifiée 
                    ou amendée par un juge-arbitre. Cependant, en décidant 
                    au sujet de cas comme celui-ci, il faut donner au libellé 
                    de la Convention une interprétation d'intention, afin 
                    de pouvoir en interpréter le but et l'intention. En 
                    cherchant à l'extérieur une autre base de calcul, 
                    l'action de l'Administrateur était appropriée 
                    et cohérente avec l'intention de fournir une indemnisation 
                    équitable des réclamants, en conformité 
                    avec leur situation économique individuelle.
 
 19. Un juge-arbitre ne doit intervenir avec les résultats 
                    d'une telle analyse indépendante que dans des circonstances 
                    exceptionnelles. Cependant, en faisant leur calcul, les comptables 
                    ont utilisé la semaine de travail de quarante heures 
                    comme base d'évaluation. Selon les preuves que j'ai 
                    devant moi, ce serait une base normale de calcul pour toutes 
                    les personnes autres que le propriétaire de l'entreprise. 
                    Le point important est que le réclamant est le propriétaire 
                    et même si la méthodologie d'évaluation 
                    du revenu en multipliant le taux de salaire moyen dans une 
                    telle entreprise par le nombre d'heures travaillées 
                    est sensée, elle doit être appliquée à 
                    son cas individuel et non pas de manière générique 
                    comme s'il s'agissait d'un employé. Selon les preuves 
                    qui m'ont été présentées, elles 
                    ne sont pas en faveur des comptables, en particulier le témoignage 
                    de collègues bijoutiers et des personnes qui exploitaient 
                    des entreprises semblables à celle du réclamant. 
                    Il s'ensuit donc que si l'on veut logiquement appliquer la 
                    méthode de calcul à la situation du réclamant, 
                    il faut modifier le nombre d'heures par semaine de quarante 
                    heures à quatre-vingts.
 
 20. En conséquence, je conclus que même l'Administrateur 
                    s'est engagé dans l'exercice d'établir équitablement 
                    et correctement le calcul de la perte de revenu du réclamant, 
                    dans ce cas pour l'année 2000, et que l'Administrateur 
                    a agi correctement à cet effet en cherchant une autre 
                    méthode de calcul, il serait inéquitable de 
                    ne pas recalculer le montant des comptables en insérant 
                    le nombre réel d'heures par semaine, comme on peut 
                    le mieux l'établir en fonction des preuves fournies, 
                    que le réclamant aurait travaillé s'il n'était 
                    pas tombé malade et avec droit à une indemnisation. 
                    En termes simples, étant donné que le but de 
                    la Convention de règlement est de fournir une indemnisation 
                    adéquate et équitable aux victimes de cette 
                    maladie conformément aux modalités de la Convention 
                    et étant donné que l'Administrateur a pris une 
                    décision fondée sur une information qui n'était 
                    pas conforme à tous les faits du cas tel que présentés 
                    dans la preuve, je dois conclure que l'erreur de calcul doit 
                    être corrigée. Ainsi, la décision de l'Administrateur 
                    est modifiée pour refléter le calcul suivant 
                    : 14,36 $ x 80 heures par semaine x 52 semaines
 
 21. Pour les raisons que j'ai indiquées, il en résulte 
                    que la réclamation obtient gain de cause tel qu'il 
                    est indiqué plus haut.
 
 
 
 Datée à Vancouver, Colombie-Britannique, ce 
                    10e jour de juin 2002.
 
 John P. Sanderson, c.r.
 Juge-arbitre
 
 
  
                    
						
                 |